A l'honneur en cette fin de semaine, le groupe Mi Ami, chroniqué par un nouveau venu dans la maison. Le trio de San Francisco revient délivrer une nouvelle bourrasque pleine de gémissements, de transes et de furie. Ecoute impérative.

Mi Ami

INDIE A l’honneur en cette fin de semaine, le groupe Mi Ami, chroniqué par un nouveau venu dans la maison. Le trio de San Francisco revient délivrer une nouvelle bourrasque pleine de gémissements, de transes et de furie. Ecoute impérative.

Quand on voit Mi Ami en live, on pense qu’ils font partie de
ces groupes qui ne peuvent qu’être décevants sur album. Pour une fois on se
trompe. Dès la première seconde de STEAL YOUR FACE, on est
littéralement pris à la gorge. A côté, Now
I Wanna Sniff Some Glue
des Ramones a un départ en douceur. Et le plus
impressionnant, c’est que cette intensité ne connaît presque aucune baisse tout
le long de l’album. Si Dreamers
ralentit un peu le tempo, c’est uniquement pour rendre le tout audible d’une
traite. Car il faut bien l’avouer, si « Steal your face » est un
excellent album, son écoute reste au premier abord une expérience difficile. Le
rythme est constamment haletant et on a que peu de moment pour respirer. On
sent de la part de Mi Ami une volonté de pousser le son le plus loin possible.
La composition du trio respecte pourtant l’habituelle trinité du rock
band : un guitariste qui chante (le père), un bassiste (le fils) et un
batteur (le saint-esprit). Mais ici le son du groupe forme un tout
impressionnant.

Déconstruction de la
musique pop

On est loin des énièmes groupes au son compressé à l’excès, où
tout sonne si propre, si détaché. Dans Mi Ami, tous les musiciens sont au même
niveau. Et la voix est utilisée véritablement comme un instrument. Le
guitariste, Daniel Martín McCormick, refuse de chanter de simples paroles qui s’imposent
au premier plan, à l’écart des instruments et sans véritable travail sonore. Il
ne s’agit pas d’avoir une belle voix mais de savoir la faire sonner. McCormick
ne fait pas que chanter, il fait de sa voix une sorte de gémissement agressif
dont l’intensité et le rythme sont tout bonnement impressionnants et peu
importe si les paroles sont parfois inaudibles. Sa voix se fond dans un son
sauvage, envoutant qui donne l’impression d’assister à un surplus d’énergie
dans chaque seconde de cet album de 6 chansons, presque toutes longues de plus
de 5 minutes. Que ce soit dans la groovy Latin
Lover
, la hargne déchainée de Secrets,
la plainte de Dreamers ou le tribal Native Americans, le son de Mi Ami est
violent et se base sur des rythmes amples et répétitifs. Cet album, enregistré
en 5 jours, est une véritable bombe, impossible à écouter d’une seule oreille. 

 


Plus on écoute « Steal your face », plus on
découvre sa subtilité, tant dans sa composition musicale que dans sa
conception. Car sans avoir l’air, cet album s’avère presque, oh mon dieu,
conceptuel. Ceci jusque dans son titre et sa pochette. Le titre signifie
évidemment « vole ton visage » mais il s’agit également du nom d’un
album du Grateful Dead sorti en 1976. La pochette du disque est illustrée par
la photo de trois monuments de la musique pop rock mondial : Bob Marley,
Jerry Garcia du Grateful Dead et Jim Morrison.  Mais ces photos ne sont pas là telles des totems en hommage
aux précurseurs. Au contraire, les visages des trois musiciens sont coupés,
lacérés, défigurés. Bob Marley devient vampire à quatre yeux, Jerry Garcia une
boule noire, et Jim Morrison est traversé par le visage d’une fille. Leurs
visages sont bel et bien volés ; non pas un vol pour s’approprier un
héritage mais un vol dont le but est le blasphème. McCormick, dans une
interview à Noripcord, explique la signification de cette violence visuelle. Il
s’agit de critiquer  ces trois
figures car elles représentent, selon lui, des pseudo révolutions musicales qui
sont aussitôt tombées dans la standardisation. Ils représentent tout trois des moments
où le mainstream se donne l’apparence de la subversion, que ce soit pour son
côté exotique, son impro ou ses textes de poètes maudits. Deux chansons citent également
entre parenthèses des titres de chansons célèbres : Genius of Love de Tom Tom Club et Born in the U.S.A. de Bruce Springsteen. Mais de nouveau, on
assiste à un renversement total. Autant Genius
of Love
de Tom Tom Club était une joyeuse et trépidante chanson d’amour,
autant la version de Mi Ami est hachée et raconte un amour détruit et
destructeur. Born in the U.S.A.
devient Native Americans et sous une
mélodie évoquant les paysages désertiques détourne la signification du titre de
cette chanson pour rappeler que ceux qui sont les premiers à être nés aux
U.S.A. sont ceux qu’on a exterminés. Ces quelques éléments montrent la volonté
de « Steal your face » : subvertir les modèles musicaux pour
créer une musique intense et sans concession.

  

Ceux qui ne se rendent
pas à Kilbi le samedi devront être à l’usine (Genève) le 29 mai pour voir Mi
Ami en compagnie de Wolf Eyes.

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