La première soirée du festival Impetus attaque fort. Nouveauté remarquable dans le paysage des festivals atypiques d’Europe, cet événement qui se veut ouvert et bruyant semble bien tenir ses promesses après une seule soirée. Vivement la suite! En bonus, les Lords of Altamont en interview ci-dessous.

Lords of Altamont

Venus de Los Angeles en Triumph Rocket, les Lords of Altamont jouaient jeudi soir sur la scène exiguë du Bleu Lézard, à l’occasion du festival Impetus. De la musique pour les mecs qui boivent de la bière, qui frappent leur femme et qui disent des phrases comme « tu veux qu’on se la donne » en explosant des bouteilles de bières sur le bar en chêne d’un assommoir testostéroné.

 

 

 

" Je suis un putain d’aliéné "

Cuirassés de blouson noir et de tatouages rockabilly, ils entrent sur scène dans un fracas de tôle broyée et de bruit de moteur, 4 soupapes, 6 cylindres, 8 pistons, du matériel binaire. Le chanteur, grand, maigre, de noir évidemment vêtu, cheveux longs, noir, et lunettes à soleil, noire, se poste instinctivement sur son clavier Farfisa rouge, seule élément de couleur scénique.Le Hard Rock, comme le Blues dont il découle partiellement, est intimement lié à l’invention de la guitare. Comme le Do majeur est la gamme des débutants au piano, la gamme pentatonique, spécialement celle de Mi, sur laquelle se base une grande partie des morceaux de Hard Rock, est la gamme la plus spontanément jouée sur une guitare. Le Hard Rock n’aurait jamais été celui que nous connaissons si l’on avait donné à la guitare un accordage différent à son invention et les Lords of Altamont, maîtres en la matière, ne joueraient certainement pas ici ce soir tant ils sont représentatifs de ce style.

Altamont Speedway, nom du circuit qui accueillait en 1969 les Rolling Stones pour un concert démesuré où les bikers des Hells Angels ont joué du couteau. Le décor est posé. Les acteurs portent chacun de ces noms avec un sobriquet entre guillemets, tels Jake “The Preacher” Cavaliere, au chant, ou Shawn "Sonic" Medina, à la basse. Comme le disait William Hazlitt, « un surnom est le plus irréfutables des arguments ». La fine équipe à bottines ne débarquait pas de nulle part quand celle-ci sortit en 2003 son premier album, sobrement intitulé To Hell With The Lords : on a ce soir sur scène un groupe créé sous l’inspiration ténébreuse des Cramps – surtout – et des Fuzztones – aussi. Du coup, on retrouve une fusion bouillante de punk et de métal, mais dont la base résolument garage permet de ne pas se perdre dans du bourrin sans charme : le titre « Cyclone » et ses cris bien sentis reflètent parfaitement cet équilibre fragile. Mais avant tout, les Lords savent rouler les mécaniques sur la scène très intimiste du Bleu Lézard (le manque de place…ce pourquoi ils ne sont que quatre ce soir ? Ou en ont-ils perdu un sur la route 666?), si intimiste qu’on aurait pu récupérer les gouttes de sueur des fanfarons sauvages et les revendre sur eBay. Leur dernière prestation en terres vaudoises, il y a quelques années à l’ancien Romandie, profitait de planches peut-être plus à la hauteur de leurs impétueuses machinations – d’ailleurs la batterie ne finira pas à terre, ce jeudi soir. On a eu droit néanmoins aux coups de pied dans les airs, à des riffs cruellement agressifs, à un clavier bringuebalé dans l’insouciance et autres slams au premier plan tandis que le batteur, Kevin "The phantom" Starr, agite ses bras de géant tout autant pour mettre son instrument en avant – ne se limitant pas à un simple rôle de structuration – que pour s’adapter à la chorégraphie du groupe.
Les demoiselles en débardeur ont apprécié.

Alors que le Romandie atteignait l'ébulition, la Cave du Bleu Lézard, là, légèrement au-dessus du Romandie, remplissait aussi son rôle d'acteur de la scène rock lausannoise en proposant une affiche elle-aussi plus qu'alléchante. Les Lords of Altamont, groupe bien connu de la rédaction (voir photos ci-dessous) livraient un concert absolument dément, où Jake Cavaliere aurait converti n'importe quel endormi à la musique du diable. Ce groupe est d'une toute grande dimension, c'est à n'en pas douter. Et, comme le disent si bien les programmateur du Impetus, "une chope d’huile de vidange, barman, s’il vous plaît!". Associé à notre ancien rédacteur en chef Laurent Marthaler, Laurent Küng rencontrait le "Preacher" pour une interview dans les backstages. Morceaux choisis.

Lords of Rock: est-ce que le concert de ce soir vous a plu ?

Oui, c’était très bien, le public était réceptif, comme c’est souvent le cas dans les petites salles de concert.

Vous préférez donc jouer sur de petites scènes plutôt que faire des stades ?

Oui, je préfère l’intimité des modestes scènes, les gens comprennent ce que tu dis et peuvent interagir avec toi.

Peux-tu me citer quatre groupes que tu placerais parmi tes influences principales ? 

MC5, the Stooges, Human Society, Music Machine.

Quelle est ta meilleure expérience de concert ?

La semaine passée, on a joué dans une base militaire aux Etats-Unis et il y avait quelque chose comme 150 GIs qui sont venus à notre concert. Certains d’entre eux partaient le lendemain pour aller faire la guerre et c’était un sentiment assez étrange de se dire que ces mecs vont peut-être bientôt crever et que le dernier groupe qu’ils auront pu voir sur scène, c’est nous.

Vous avez déjà joué dans un hôpital psychiatrique, comme les Cramps ?

(Rire) Non, ça serait génial. Mais, dans une certaine mesure, on le fait tous les soirs, les gens qui viennent à nos concerts sont fous, même moi, on me laisse monter sur scène alors que je suis un putain d’aliéné.

En relation avec les GIs qui ont peut-être écouté votre musique pour la dernière fois, quelle est la musique que tu voudrais entendre au moment de mourir ?

C’est une question délicate, (hésitation de 15-20 secondes), je dirai "Dirt" des Stooges.

Quelle est le secret de la longévité d’un groupe selon toi ?

Je n’en sais rien. Au début j’avais un groupe à qui on avait donné un million de dollars pour enregistrer un album, on en a dépensé 700'000 en studio, sans avoir composé aucun tube, et pas grand chose qui nous plaisait. Maintenant, on fait de la musique sans trop d’argent, on fait ce qu’il nous plaît, et ça marche pas trop mal.

(En faisant référence à son badge Triumph, une illustre marque de moto anglaise) Tu as une Triumph chez toi, à Los Angeles ?

Putain, ne m’en parle pas. J’avais une Triumph de 77 mais, je ne sais pas trop pourquoi, je l’ai vendue avant de partir en tournée, elle était géniale. Mais je pense en racheter une en rentrant.

 

 

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