Tortoise à Antigel

Une écoute au single « Gescep » suffit pour se rendre compte que Tortoise a abandonné sa zone de confort pour faire ce que le groupe adore : explorer. Fort d’une carrière de 25 ans, le quintet de Chicago a su peaufiner une musique basée sur les métissages : de l’ambient de Brian Eno à l’Americana cinématique d’Ennio Morricone, passant par le jazz, le hip hop abstrait et le dub. 

La presse inventa un nouveau nom pour cette approche, qui refusait la dictature à la fois de la voix et de la guitare du rock traditionnel : le post rock. Le groupe est conformé à la base par des instrumentistes polyvalents, dont la formule classique est : deux basses, deux batteries et une guitare/un clavier (et toutes les combinaisons possibles). Les vibraphones font aussi partie du jeu. 

Le groupe a évolué dès ses débuts dans les années 1990 comme une démocratie et un collectif. Selon le bassiste Doug McCombs, voilà le secret de leur longévité artistique. Tortoise manifeste également un détachement des gammes classiques liées au blues. Les premiers albums, TORTOISE (1994) et MILLIONS NOW LIVING WILL NEVER DIE (1996) ont pavé la voie pour l’apparition d’un mouvement de musiciens qui basaient leurs compositions sur les instruments.

Il s’agit donc de développer des morceaux souvent longs qui évoluent à travers une narrative étrangère à la structure pop du verset-refrain-verset. Mogwai, Godspeed You Black Emperor, Do Make Say Think et Rachel’s en sont quelques exemples, chacun dans leur style. Dans le cas de Tortoise, leur nouvel album prouve qu’ils n’ont pas épuisé leur potentiel créatif, car ils sonnent plus radicaux et intenses que jamais.   

En effet, THE CATASTROPHIST plonge à la fois dans le minimalisme hypnotique et contemporain (Philip Glass, en concert également à Antigel, Steve Reich), ainsi que dans la musique basée sur des synthétiseurs des années 1970 et 1980. Nous arrivons à ainsi à un mélange parfois dense de sons et de textures qui tournent avec beaucoup de force, tel des courants sous-marins énormes.

Le nouveau disque incorpore aussi des voix féminines, quelque chose d’assez inédit pour Tortoise, dont Georgia Hubley de Yo La Tengo. Le groupe de Chicago tourne rarement : il ne sort de disques que de façon très éparse. Plus de six ans se sont écoulés depuis le dernier. L’occasion de les voir à Antigel est donc exceptionnelle. Leur live est impressionnant, autant par l’énergie puissante de l’interprétation que par le changement constant d’instruments de la part de ses membres.

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