The Notwist aux Docks

The Notwist est un groupe unique. Ces allemands de Weilheim ont réussi un peu avant tout le monde le mélange de rock et d’électronique d’avant-garde. En effet, le groupe a sorti SHRINK (1998) quelques années avant KID A (2000) de Radiohead, en empruntant une voie qui allait être reprise par les anglais, où le post rock, la minimal techno, le jazz et la drum-and-bass ne connaissent plus de frontières. La consécration est venue quelques années plus tard avec NEON GOLDEN (2002). Certes, la description peut sembler technique et cérébrale mais le sextet centré sur les frères Micha (basse) et Markus (guitare, chant) Acher et Martin Gretschmann (claviers, samples) sait comment rester simple et émouvoir. Car, un des aspects les plus prenants du genre inauguré en 1995 avec une version remixée de "Torture Day" de Notwist (Cynthia Dall de Smog aux voix et des rythmes empruntés à la trip hop), c’est à dire l’indietronica – de l’électro à la Aphex Twin mixée avec de l’indie rock à la Sonic Youth et du shoegaze ­–, est celui de rendre les machines mélancoliques et sensibles.

Dès les premiers accords de Good Lies, The Notwist a déployé un son envoutant et intimiste qui a inondé la salle des Docks. Le morceau – qui ouvre THE DEVIL, YOU AND ME (2008) – est une longue montée de guitares circulaires en mode krautrock (on pense aux boucles mélodiques de Can) avec la chaleur des accords de My Bloody Valentine. Le sextet a tout de suite enchainé avec deux extraits de leur tout nouveau CLOSE TO THE GLASS : le titre éponyme aux textures électroniques denses et radicales, puis le single "Kong" avec ses mélodies entrainantes et sa rythmique qui explose vers la fin. Le concert continue, tube sur tube, avec "Boneless" et sa mélodie hantée, "One with the freaks", "Pick up the phone", "This Room", "One dark love poem" et "Gloomy planets". Les allemands ont réussi a captivé leur public grâce à leurs chansons introspectives et très intenses, à la transe constante grâce à la surcharge de rythmes et de sons créée par les six musiciens sur scène.

D’ailleurs, les assistants au concert avaient plutôt la trentaine et la quarantaine, quoique des plus jeunes étaient aussi présents. Mais, il ne s’agissait pas d’une audience qui allait pour la mode. Car, The Notwist fait une musique qui attire les gens plutôt timides, ce sont des musiciens au style très humble et au look normal, sans aucune prétention autre que celle de créer des sensations fortes et complexes. Dans ce sens, l’attitude des allemands les rapproche de celle de Yo La Tengo.

En effet, l’émotivité de The Notwist joue sur le côté artistique qui consiste à provoquer des champs d’affects très difficiles à décrire. C’est grâce aux chansons que ceux-ci peuvent s’extérioriser et être ressentis de façon très profonde : c’est le langage utilisé pour communiquer l’inexprimable, la seule voie pour arriver à cette manifestation. En guise de rappel, le sextet a entamé deux versions électroniques longues et retravaillées de Neon Golden et Pilot. Le public ne voulait pas les lâcher si tôt et les allemands sont revenus jouer un deuxième rappel avec Paralysed, avant de repartir. Sans doute, il s’agit là d’un des concerts les plus beaux de l’année : émotion et avant-garde déployées en même temps. D’ailleurs, les allemands tournent rarement : leurs projets parallèles, tel que Ms. John Soda, Lali Puna, Console et Tied and Tickled Trio, imposent à ces musiciens un partage de leur emploi du temps. Une mention à part mérite le jeu de lumières déployé lors du concert de The Notwistaux Docks, sobre et hypnotique, avec une préoccupation pour la mise en scène qui rappelle celle de leurs compatriotes de Kraftwerk.   

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