La première soirée de cette cuvée 2010 du For Noise proposait sur l’affiche une suite de noms à faire rêver le plus flasque des aigris, et sur scène les promesses étaient mille fois remplies.

Pully For Noise

REVIEW La
première soirée de cette cuvée 2010 du For Noise proposait sur l’affiche une
suite de noms à faire rêver le plus flasque des aigris, et sur scène les
promesses étaient mille fois remplies.

Du
monde, du beau monde était réuni dans cette espèce de petite cuvette dans les
hauts de Pully, qu’il faut contourner pour accéder à l’entrée devant laquelle
Steve saluera votre départ en vous promettant une bière si vous revenez le
lendemain. Enfin si vous êtes une diva… On
retrouve les stands habituels, la pelouse encore quelque peu imbibée des
grisailles de ces derniers jours, les fidèles d’année en année. Peu de temps
pour se remémorer les grands clashs des années précédentes sur ces mêmes terres
que Local Natives enclenche son set.
Les gus de Los Angeles offrent des compositions à la fois familières et
dérangeantes, où l’ambiance balance des paysages sereins de la petite maison
dans la prairie aux devants de discothèques mal fréquentées où les nerfs sont à
vifs. Le ton change d’un titre à l’autre, l’aléatoire semble être le maître mot
de la prestation, refondant joyeusement leur debut album, « Gorilla Manor », fraîchement sorti et
fraîchement admiré par la critique. Local Natives ne ménagent par leurs
morceaux en live tout en restant très justes dans les sons balancés, ceci étant
d’autant plus étonnant que leurs papillonnages énervés semblent parfois une
bonne prise de risques. Ainsi, dur de suivre les mouvements-riffs de Taylor
Rice (qui frustra plus d’un imberbe ce soir avec sa magnifique moustache d’une
densité hypnotisante), véritable excité se partageant les voix avec Kelcey
Ayer. Tout cela apporte un regain d’énergie dont on pouvait quelque peu
regretter l’absence sur leur galette, tant l’accent était mis sur la finesse
des arrangements. Quoique la fin du set prît quelques airs de redondances. La
bande marque aussi par son souci des percussions : la batterie alterne
jeux de finesse et tapages hyperactifs et on s’offre même un intermède où
chacun se saisit d’un joujou pour une envolée de percussions allègres. Aux
placards les traditionnels solos de guitare, Local Natives optent pour d’autres
cordes à leur arc.

On
enchaîne sec au For Noise. Caribou
prendra les rênes de la Grande scène pour les relâcher qu’une petite heure plus
tard, alors que les appels de My Heart Belongs To Cecilia Winter se font
entendre de l’Abraxas. Mais on ne peut décrocher de Caribou. A peine 8 mois se
sont écoulés depuis la venue des Canadiens sous l’arche du Romandie, mais on
sent que le dernier marmot de Dan Snaith s’est bien fait rôdé sur scène. Si on
pouvait trouver que leur set d’avril n’était que trop peu contrasté à ce qu’on
pouvait écouter confortablement chez soi, il en est autrement ce soir, sans non
plus sortir trop radicalement des sentiers battus. Regroupés au centre de la
scène, en cercle de façon à ce que chacun des quatre acolytes puisse se faire
face, chacun en chaussettes comme pour mieux ressentir les tremblements
rythmiques de  Brad Weber, aux
mimiques concentrées. Ce positionnement décalé a quelque chose de prenant, même
si le visuel assuré par les animations en fond sur bâche blanche était moins
accrocheur qu’au Romandie, ce qui n’est pas vraiment déplaisant ; on peut
alors mieux se canaliser sur les musiciens et la musique. Le set est également
plus équilibré ce soir, les titres de « Andorra » et
« Swim » se mélangeant cette fois selon une suite certainement
mûrement réfléchie. Dan Snaith reste celui qui a le plus la bougeotte
instrumentale, lâchant son synthé et ses boutons pour une seconde batterie,
certes plus condensée mais qui, liée avec celle de Weber et son drum kit électronique, fait trembler les
cages thoraciques jusqu’au dernier rang. L’apothéose viendra avec Sun qui clôt la prestation en osant
cette fois plus que toute autre risquer un remodelage scénique ultra-tonique et
psychédélique. Caribou a ce soir définitivement rempli ses promesses, laissées
encore bancales à l’heure du Romandie.

Mouvement de foule massif en direction de l’Abraxas,
petite scène en intérieure qui aura du mal à contenir le succès de My Heart Belongs to Cecilia Winter, qui
confirme alors que le trio de la Limmat méritait haut la main sa place sur la
Grande scène. Chaleur étouffante magnifiée par le retour brûlant des tireuses à
bière en pleine face, on ne voyait pas l’ombre d’un poil de mouton depuis le
fond de la scène. Le cœur saignant, on passe notre tour pour découvrir les
autres festivités offertes par le For Noise. Après tout MHBTCW flâne et flânera
encore sur toutes les scènes de la Suisse, tant ils/elle sont demandé-e-s. Pas
loin de l’entrée de l’Abraxas, une bande de joyeux drilles du doux nom de Riond
et les groupies vous propose un petit exercice de karaoké-rétro pour vous
mettre du baume au cœur. On osera tout de même retenter l’aventure Abraxas une
dernière fois, et avec succès. Trois derniers titres pour se mordre les doigts
de n’avoir pas pu percer l’assistance plus tôt : My Heart… offre ces
mélodies mélancoliques à en devenir des hymnes qui peuvent tenter d’arriver à
la cheville d’Arcade Fire, version « Funeral ». Du dream-pop qui
donne des papillons dans le ventre tout en se laissant aller parfois à du lo-fi
brumeux. Un beau mélange finement dosé. On ne peut que comprendre l’engouement.
Mais la fin du set se voit quelque peu molesté par des problèmes de son (récurrences
annuelles dans cette scène de l’Abraxas) allant jusqu’à sévèrement énerver le
meneur de jeu qui lance alors en dernière intrigue une chanson en acoustique
sous la fougue du public. On tient quelque chose, c’est certain.

Jonsi (photo) s’annonce quant à lui sur la grande scène. Toutes plumes dehors, un
concentré d’émotions nous chope au tournant. S’il est toujours difficile de
comprendre les épopées solo soit-disant temporaires d’un artiste loin de sa
formation initiale, on saisit néanmoins à l’écoute de « Go » que
cette infidélité à Sigur Ros lui permet d’aller plus en avant dans
l’expérimentation à l’aide de musiciens fort habiles maniant des instruments
aux noms inconnus de la plupart. D’où vous rapporter l’inénarrable. Sur scène,
Jonsi redistribue les vibrations de son album avec une force sur-puissante plus
quelques nouvelles chansons, le tout sur fond visuel travaillé. On ne pouvait
se douter qu’il se cachait encore tant de choses derrière des titres comme Kolniòur ou Boy Lilikoi, on pensait pourtant en avoir fait le tour de cet
album. Déçu en bien, comme on dit ici. Frissons et silences respectueux seront
le lot du public, quasiment tétanisé par tant de regards communicatifs de la
part de Jonsi et ses acolytes. Ovation, ovation, ovation. Cette
soirée au Pully fut la gloire des batteurs : Local Natives, Caribou et
Jonsi offraient des génies en la matière, de véritables Shiva avec quatre bras
et autant de pieds. Fini le rôle archaïque du pur maintien de la structure.
Pully, mon amour, on ne peut que se réjouir de te retrouver ce soir.

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