dimanche , 3 novembre 2024
For Noise, ou apologie du grondement à Pully. Une messe noir, un râle rèche, brut. On a frôlé la perfection hier soir pour la dernière soirée du For Noise. Et l'on n'oubliera pas les belles promesses du week-end.

Pully For Noise, troisième soir

For Noise, ou apologie du grondement à Pully. Une messe noir, un râle rèche, brut. On a frôlé la perfection hier soir pour la dernière soirée du For Noise. Et l’on n’oubliera pas les belles promesses du week-end.

Dernière soirée, 18h. Le vent se lève pour l’arrivée sur scène d’Anna Aaron accompagnée de son groupe. Première date en Suisse romande pour la jeune Bâloise devant un parterre attentif, qui a dans l’idée de voir ici une future révélation. Il y a encore des hauts et des bas dans la musique d’Anna Aaron certes, mais n’est-ce pas le propre de la jeunesse ? En tout cas, voici une bien belle promesse et, l’air de rien, la Suisse alémanique nous envoie chaque année une nouvelle petite perle folk-pop, après bien sûr Sophie Hunger mais aussi Evelinn Trouble ou encore Heidy Happy. Beaux joueurs, les romands les accueillent toujours à bras ouvert, à défaut de dénicher par ici des talents?

 

 

Anna Aaron: une bien belle promesse

 

 

Les satisfactions continuent avec le concert de Revolver (photo), plus tard aussi sur la Grande Scène. Secondé par un batteur, le trio consiste en un chanteur aux faux-airs de Chris Isaak fan d’Elvis, Ambroise, Christophe à la guitare acoustique et le discret Jérémie à la contrebasse. Leur plan marketing appelle leur musique de la “pop de chambre”, on préfère y voir un groupe de goût, précoce et qui parvient à tenir la route sur scène. Si les références aux Beatles, revendiquées, rebutent, on préfère les comparer aux Kings of Convenience, plus actuels et comparaison moins risquée pour ces jeunes Parisiens. Il faut dire que leur album MUSIC FOR A WHILE a provoqué une belle joute verbale des critiques et une hystérie que Revolver balaie avec classe Il leur manque encore un chouïa de présence scénique pour capter totalement l’attention. Patience donc pour ces jeunes gens appliqués. L’avenir est devant eux.

 

 

 

 

 

D’Austin, Texas, The Black Angels (photo) est le gros morceau psyché de la soirée. Reste que pour le mur du son, il faudra repasser, la faute au vent et à cet insupportable zèle de la police sur son. Dans ces conditions, on appréciera tout de même les ballades narcotiques du quintette, où l’on aura eu la chance de découvrir 4 nouveaux morceaux de l’album à venir (notamment “Drone in G#Major”). Alex Maas partage ainsi plus souvent le micro avec les 2 guitaristes Nate Ryan et Christian Bland, tout comme Stpéhanie Bailey est secondée à la batterie par Kyle Hunt pour un mémorable exercice tribal. The Black Angels ne semblent pas pressés par le temps, perdus dans l’horologe interne musicale, comme pour mieux déployer leur musique d’envergure. “Turn on, tune in, drone out” comme aime bien le répéter le groupe texan, détournant le message christique de Timothy Leary, apôtre toxique du LSD. Encore un concert du tonnerre au For Noise pour un public qui n’en demandait pas tant devant des morceaux de la trempe de “Science Killer” ou “Young Men Dead”. Et la palme de la bêtise à mon voisin illuminé, visiblement en forme: « le guitariste à gauche c’est Johnny Greenwood (ndlr: de Radiohead)! »

 

 

 

Encore un concert du tonnerre au For Noise

 

 

 

Une tentative de manger un raclette backstage plus tard, on assiste, au loin, à la prestation massive de Ghinzu. Le public hétérogène semble ravi d’affronter quelque chose de plus direct que The Black Angels mais pour notre grand malheur, pas vraiment la plus grande des finesses qui soient. Reste que si le groupe belge est encore vivant après une longue pause, il le doit à ses lives où il va au charbon sans la prétention de sauver le monde. A défaut, le son semble ici curieusement plus athlétique que leurs prédécesseurs. Ou sont-ce les excès vocaux John Stargasm qui nous font douter de l’impartialité présupposées des gardiens du volume ? Ghinzu, c’est pas mal en concert, accordons-le. La Belgique nous trompe rarement sur sa marchandise. Sauf qu’elle aurait pu avertir le groupe que Pully parle aussi le français, comme eux…

 

 

 

 

Transi par le froid, on se dit qu’il faudra une grosse prestation d’Ebony Bones! pour nous retenir à Pully. Bon, il faudrait être bête pour n’emporter qu’un T-Shirt me direz-vous, mais qu’en est-il alors du guitariste d’Ebony, qui a troqué une hilarante coiffe egyptienne contre ses habits visiblement ? Pas de pitié ni pour ses musiciens, ni pour le public: malgré le froid à déprimer un islandais, ou presque, Ebony met la foule dans sa poche de robe à te filer une crise d’épilepsie. Ô que les mauvaises langues l’attendaient au tournant, prêt à dégainer sur la fantasque londonienne. Ou quant la hype peut te faire passer pour une conne. Ici, pas de pop songs cul-terreuses à la Lily Allen, c’est plutôt le carnaval de Rio de la génération New-Rave, au grand dam des pingres et des blasés. Voici le Londres du 3ème millénaire devant vous.  « Preparing the rebellion », tel est son créneau, son album BONES OF M BONES (chronique du disque) en atteste. Arrivée de nulle part, plus punk qu’on pourrait le penser avec ses autours de muse de Castelbajac – elle a grandi aux côtés des Clash et de Vivienne Westwood – elle terrasse une concurrence (MIA, Santigold) qui ne sait plus quoi faire pour y survivre. « Mais quelle extravagance ! » aurait-on entendu. On ignorera le côté “eurodance” et grime pour retenir cette incroyable vigueur flamboyante d’Ebony Thomas. L’artiste féminine de l’année ? Sans aucun doute…

 


Le carnaval de Rio de la génération New-Rave

 

 

Vous l’auurez compris, cette 13ème édition du Pully For Noise perpétue la réputation du festival. Aline Méan, de l’organisation: « après avoir connu des éditions moins fréquentées, les organisateurs se félicitent de cette affluence et bénissent le Dieu Soleil de les avoir accompagnés durant ces trois jours. Une édition au bilan positif marquée par une programmation à la pointe et des prestations remarquables. Au fil des années, le For Noise Festival confirme définitivement sa place d’événement incontournable dans le calendrier estival suisse ». Des programmes de cette trempe-là, on signe tout de suite pour 10 ans. Comment mieux boucler la saison des festivals ?

 

Les différents interviews du Pully For Noise (Metronomy, Ebony Bones!, The Black Angels, Revolver etc.) sont à retrouver toute la semaine prochaine sur Lords of Rock!

Photos: Julien Gremaud

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