Malgré un contretemps pour cause d’interview pressante avec un de nos confrères, Lords of Rock a pu rencontrer Peter von Poehl. Mais, pour notre journaliste Sophie, ce charmant suédois a, comme vous le verrez, extrêmement bien développé ses réponses. Dans l’empressement certaines de ses explications ne peuvent éviter l’égarement. C’est que ça tourbillone dans le cerveau de Peter…
Lords of Rock: Peux-tu nous dire quelque chose à propos de toi ?
Peter von Poehl: Je viens de Malmö dans le sud de la Suède, mon père est d’origine allemande, ma mère est suédoise. J’ai une relation un peu bizarre avec mon pays, j’ai donc commencé à bouger très tôt, quand j’avais 16 ans je suis par exemple allé à l’école en Autriche. J’ai vécu dans pas mal d’endroits, entre l’Espagne, l’Amérique du Sud, Paris, Berlin. Je dis ça aussi parce que mon premier album parlait énormément de ça et je crois que c’est un thème qui m’a suivi des années. Déjà à l’époque je travaillais beaucoup avec d’autres artistes, j’écrivais des chansons, je faisais des disques. Mais j’ai longtemps évité de faire un disque en solo. J’avais tout de même essayé d’en écrire un mais il a fini à la poubelle. Le problème, ou la chose compliquée, c’est que si l’on fait un disque pour soi, de quoi a-t-on envie de parler ? Qu’est ce qui est si important ? Parce que c’est facile quand on travail pour les autres: je suis quelqu’un de très responsable, je rends toujours les bandes le bon jour, je suis très rassurant mais, par contre, la responsabilité ultime, ça je ne l’ai pas! Du coup, quand je fais un disque avec mes propres chansons, c’est la question: de quoi va-t-il parler ? Qu’est ce que j’avais à dire ?
« J’ai longtemps évité de faire un disque en solo »
Il vaut mieux parler de ce qu’on connaît, c’est ce qui est important. Mon premier album était tellement basé sur un thème qui m’avait suivi, cette relation ambigüe avec la Suède, quelque chose qui est très familier et en même temps très étrange, tout tourne autour de ça. Après, justement par rapport au deuxième album MAYDAY, j’avais peur de refaire le même disque, de retomber dans le même thème et de refaire les mêmes chansons. Donc la seule façon de m’échapper de moi-même était de demander de l’aide à quelqu’un d’autre. J’ai pratiquement la moitié de mes textes qui sont écrits par la Française Marie Modiano.
Est-ce que des fois vous réécoutez vos premiers albums d’une oreille critique ?
Il n’y a pas si longtemps j’ai entendu par hasard un de mes morceaux dans un restaurant, et après j’ai écouté tout le disque. J’ai une certaine méthode de travaille rapide tout en recommençant 150 fois. A un moment donné on sent quand c’est fini. Quand je le réécoute, je crois que c’est une sorte de blueprint. On voit où on est au moment où on le fait, qui on est, et ce qu’on pense! Je ne l’avais pas réécouté avant. D’un côté, on change, ça faisait trois ans qu’il était sorti. Mais on voit aussi qu’on ne change pas justement… C’est curieux parce que ce n’est qu’une sensation. Ce qui est facile dans la chanson de trois minutes trente-couplet-refrain-couplet-refrain, c’est qu’à partir de cela tout peut être organisé de n’importe quelle manière et être arrangé n’importe comment! Et selon l’humeur du moment, un enregistrement c’est justement une empreinte de ce moment.
« Une sorte de blueprint »
Je me rendais compte que le disque allait sortir en Angleterre et j’ai donc refait le mastering en m’y replongeant. Je changeais des petit trucs, pas grand-chose, des petits détails par-ci par-là. C’est très curieux parce que ça correspond où je suis aujourd’hui mais ce n’est pas forcément mieux pour autant. Ou moins bien. Il y a des choses que je refais, et je me dis «wouhaaa c’est super, là j’ai refais le mix c’est beaucoup mieux!» Mais avec un peu de distance ce n’est pas du tout mieux! C’était mieux quand je l’avais fait la première fois et c’est ça qui est peut être quelque chose de génial par rapport à la musique, par rapport à une peinture. Je crois que c’est Rodin qui est allé repeindre ses tableaux dans les musées à ce propos… On peut tout le temps les remagner, les refaire et ça je trouve vachement excitant. C’est une sorte de chance qu’on a quand on fait de la musique. Il y une semaine, je faisais un concert avec neuf musiciens sur scène, hier je faisais un concert en trio et ce soir nous serons cinq sur scène. Je trouve qu’on a beaucoup de chance de pouvoir tout le temps faire des changements et de retraiter les chansons selon l’humeur du jour.
Quel est le meilleur conseil qu’on t’ait donné ?
C’est très difficile de donner un conseil ou de faire des critiques. J’apprécie beaucoup la critique vraiment constructive. Je dirais presque que ce sont les gens qui vous aiment vraiment qui sont en mesure de donner des critiques. Par exemple ; « ouais non la c’est pourri, ce que tu as fait Peter ce n’est vraiment pas bien. » C’est quelque chose qui est très difficile à dire si l’on ne connait pas hyper bien la personne ni sa musique. Si l’on n’a l’a pas suivi depuis le début, c’est impossible d’avoir un avis et c’est une chose que j’ai appris parce que pour mon premier album j’étais très protégé, j’étais dans mon appartement à Berlin, j’allais à la campagne en semaine, je ne faisais écouter à personne jusqu’à ce que mon disque soit fini pratiquement.
« J’allais à la campagne en semaine »
Après, le deuxième album a été fait d’une manière très différente, Je l’ai composé en faisant des concerts carrément sur la route, et du coup souvent je jouais les chansons le lendemain sur scène et le fait d’avoir des critiques continue, ça change vraiment les rapports. A la fin c’est peut être ça aussi qui m’a inspiré et le fait que j’ai voulu faire de nouvelles chansons. Mais ça a aussi été compliqué à gérer. Justement parce qu’on entend beaucoup de conseils et c’est très difficile a gérer ça et finalement c’est uniquement les conseils des gens qui vous connaissent vraiment bien et qui connaissent vraiment bien le projet qui peuvent compter.
Quand et où était ton premier concert ?
Mon tout premier concert? C’est une bonne question, il me semble, j’en ai fait tellement… En Suède c’est une peu soit on joue au football, au hockey sur glace ou on joue dans un groupe de garage. Quand on est ado, c’est un peu les choix qu’on a. Moi je n’étais pas très doué ni en football ni en hockey sur glace alors j’avais un groupe de garage. J’ai commencé très tôt, peut être qu’à mon premier concert je devais avoir douze ans. Je ne me souviens pas à quelle occasion c’était. C’est vraiment quelque chose que tout le monde fait, on joue tous dans un groupe de rock. C’est peut être pour ça qu’il y a aussi autant de groupes suédois qui s’exportent.
« En Suède c’est soit le football, le hockey sur glace ou le garage. J’ai choisi le garage »
Comment ressentez vous le fait de jouer au Paléo?
Ce n’est pas la première fois en fait, j’y avais déjà joué avec un écrivain. Ça me fait très plaisir, j’adore la Suisse, c’est mon pays préféré au monde. Ça me rappelle un peu la Suède. C’est bien organisé. Chaque fois qu’on passe la frontière pour venir en Suisse, ma femme se fout de ma gueule, elle dit que j’ai un très grand sourire. Mais c’est vrai que j’aime vraiment bien être ici. De plus, il y a un niveau musical très élevé.