Article et photos : Emmanuel
Aujourd’hui est un jour important. Sont attendus au banc des accusés et de pied ferme, les français de Kronos, les belges de Brutus, mais aussi, un certain Dickinson, Bruce de son prénom! Le gaillard a commis un bien joli album, quelques mois auparavant, dont vous trouverez la chronique ici, réalisée par votre serviteur.
De Metallica nous parlerons abondamment dans ce compte-rendu mais patience !
Le problème s’il devait en avoir un, à l’aube de ce troisième jour en enfer : se positionner et faire des choix ! Comment s’y prendre, tant l’offre est abondante et les affiches excellentes mais à des heures identiques ?! Qui peut se décider entre aller voir un Dickinson, Mr Bungle, Nile ? Et que dire de Metallica en même temps que les légendaires Dismember ?Ce samedi sera cornélien.
Kronos
Pour débuter ce grand marathon, il n’y a pas eu long à hésiter, puisque ce concert était de longue date agendé. Pour celles et ceux qui ne connaîtraient pas Kronos, (est-ce seulement possible ?) vous pouvez encore vous rattraper. Lorsque j’avais 20 ans (il y a un moment, donc…) j’officiais au poste de batteur dans quelques groupes locaux qui n’avaient aucune importance mais j’eu la chance, que dire, le privilège de découvrir les Vosgiens (et je ne parle pas des bonbons!) et leur fameux Colossal Titan Strife.
Voilà maintenant plus de 20 ans que Grams et Richard aux guitares, Tom à la basse, Kristof au chant et Mike à la batterie, m’accompagnent, grâce à ce disque commis en 2003.
Ne vous fiez pas à cette bien étrange pochette digne d’une production Windows 98 et sa couleur discutable rouge orangée. Derrière cet emballage peu ragoutant se trouve l’un, si ce n’est, le meilleur album de brutal français, depuis deux décennies. Bien entendu, Benighted et Imperial Sodomy ont fait du très bon boulot, mais malgré tout le bien qu’on puisse en penser, Kronos a mis la barre très haute en matière de riffs, de mélodies, de ponts, de grawls et il y a cette batterie, celle de Mike, coaché à l’époque par un certain… Dirk Verbeuren !
Le concept de ce disque ? Les dieux grecs ! Ce matin Zeus descend sur terre pour frapper nos testicules avec ses Doc Martens coquée, taille 48, pour se faire une omelette au petite dej’ ! Alors que retenti cette « colossale » intro où nous entendons frapper le fer et hénir des chevaux pendant : « Mythological Bloodbath » déboule le combo spécialement reformé depuis plusieurs mois, comme à l’origine, et ce sont bien les mêmes (sans cheveux !) et tout sourire qui investissent la scène et visiblement je ne suis pas le seul à avoir fais le déplacement!
Le son, très clair, est réglé comme il se doit pour apprécier la subtilité du riffing technique et mélodique, instantanément on replonge en l’an de grâce 2003 !
Je constate tout de suite que guitares et batterie sont millimétrées comme sur l’album. Quel bonheur.
Se déplient dans nos oreilles le gigantesque album Colossal Titant Strife, guitares ultra heavy, musicalité, harmonies, batterie intelligemment triguée d’une remarquable précision, très gros grawls. tout le monde semble aux anges.
L’album dans son entièreté ou presque, sera interprété ce matin. Les breaks sont particulièrement efficaces tout au long des titres et apportent une vigueur supplémentaire à des compos déjà très énervées.
La propreté de l’interprétation et la conviction du combo finissent de convaincre un public enchanté, ce qui, au regard des presque 21 années d’existence, d’un l’album iconique mais confidentiel, prouve la qualité des morceaux qu’il contient et la fidélité du public français.
En sus de ce beau programme, nous avons droit au « Supreme Nordik Reign » et « Mashkhith » tiré de l’album de 2001 Titan’s Awakening.
Et soudain, c’est terminé. Quel concert mes amis.
Brutus
En voilà un groupe qui était attendu en ce samedi après midi. Alors que nous nous étions réservés plus de 40 minutes d’avance, le constat est simple : la Valley est pleine à craquer. Pleine.
Tandis que je me délecte d’un énième brownie noix de pécan (jamais mangé autant de brownie en une seule journée…) déniché au VIP, merci à eux, j’aperçois Stefanie Mannaerts qui s’installe tranquillement et se règle.
Point d’artifices ici. Pas d’écrans, pas de grosses lumières, pas de techos.
Brutus est « brut » de décoffrage. Néanmoins quel contraste entre le nom du combo et la finesse de cette proposition musicale pour le moins envoutante, à mi chemin entre le post Hardcore et un rock décharnée.
Le combo belge est surprenant à bien des égards. La batteuse, également chanteuse, donne tout sur ses partie rapides et tout sur ses parties chantées, qui semble lui demander beaucoup de concentration et de souffle.
Cet après-midi, si le concert ouvre sur le vaporeux « war » tiré du second album, l’essentiel du propos est tire de Burst et Unison life qui sont mis bien à l’honneur.
Dommage parfois que le bassiste et guitariste soient mis un peu de côté par cette configuration scénique qui semble assez focalisée sur Stéfanie. À mi chemin de Pelican et Deftones, Brutus fait dans la dentelle sans faire dans le mélo. La guitare traîne comme ça, au loin, et est superbement soutenue par une basse lourde et graveleuse, qui annonce les notes vocales à la fois pesante et aériennes de Stéfanie.
Tantôt grave : « Miles Away », tantôt sombre : « What we have done », jusqu’à atteindre la rupture, Stéfanie elle-même doit parfois se reprendre un court instant pour redémarrer tant l’émotion est vive à la fin du morceau.
J’en ai vu des gens avec les larmes aux yeux cet après-midi !
Brutus c’est une expérience émotionnelle dont on ne sort, de toute façon, pas indemne. Vaporeux, dense, léger et lourd à la fois. Je me sens à la fois brisé et désespéré mais heureux. Le visage de Stefanie entre la plainte et le désespoir, et cette voix qui semble venir de l’infini. Il doit y en avoir des émotions au dedans de ce corps pour sortir toutes ces notes.
Les notes saturées de basse et les tremolos vocaux aériens m’ont anéanti.
Extreme
Oui Extreme a fait de très bons albums dont un concept album III Sides To Every Story paru en 1992. Oui Extreme est un groupe engagé politiquement. Oui Extreme possède l’un des meilleurs guitariste, pour ne pas dire guitar hero de sa génération et un chanteur légendaire en la personne de Gary Cherone. Mais, il y a un mais ! Extreme a commis un certain Pornograffitti en 1990 et voilà près de 35 ans que le public en redemande.
Et ça n’est pas pour rien que le décor est estampillé avec les couleurs et la pochette de cet album. Pas moins de cinq titres sur treize, interprétés en cette fin d’après midi. Nuno joue avec cette facilité déconcertante et son look cheyenne décontracté malgré un réglage foireux pendant « Midnight Express » qui semble quelque peu le fâcher.
Bref. Rien à redire sur une prestation douce, rock et envoutante. Toujours un plaisir de revoir le combo, donc.
Accept
Je faisais partie de ceux qui pensaient qu’Accept sans Udo c’était un peu comme l’OM sans son sponsoring Ricard ! j’avais tord. Comme j’avais tord de ne pas avoir pensé à prendre un K-way 2 XL au lieu d’un seul XL. J’y reviendrai.
L’histoire d’Accept c’est celle d’un groupe qui a joué aux chaises musicales depuis 1975 ! Rien que ça. Embrouilles, réformations, batteur qui prend la gratte (Stefan Kaufmann), guitariste qui vient, part, revient (Fischer), pas moins de quatre reformations, une lutte intestine entre le groupe du légendaire Udo Dirkschneider et finalement un Mark Tornillo au chant depuis maintenant 2009, du sang neuf aux baguettes depuis 10 ans avec le musculeux Christopher Williams et un Wolf Hoffmann aux allures de monsieur propre qui tient la barre depuis…1976 ! Bref, vous l’avez compris, le combo en a eu des aventures.
Du sang neuf et du moins neuf et une set-list extraordinaire « The Reckoning », « Princess of the Dawn », le titanesque « Metal Heart » dans une foule BON-DÉE. L’effet Metallica se fait sentir. Ça pousse de tous les côtés et en l’espace d’une heure les deux Mainstages sont pleines comme un train en Inde ! Désormais attendu comme le messie l’immense (en taille et en talent ! ) Wolf Hoffman est au four et au moulin, malgré les trois guitares désormais présentes sur scène, prend en charge, soli, rythmiques, tout en toisant les quelques 55 000 présentes ! Ultra Charismatique et jobard, le jeune homme de 64 ans, rappelle à notre bon souvenir qu’un groupe de Heavy Metal allemand est insubmersible : deutsche Qualität !
C’est officiel : il pleut, et il pleut des putains de cordes.
La pluie nous démonte. En plus d’être froide et lourde, elle abonde en continue, c’est un cauchemar. Tandis que retentissent les notes du poétique « Balls to the Wall », je me dis que ce titre n’aura jamais été autant de circonstances. Le colosse Christopher Williams nous gratifie d’une frappe assourdissante pour ce dernier titre.
Un son réglé à la perfection et un concert parfait en tous point, ce qui ne sera pas le cas de tous le monde ce soir (hum hum…).
Quelle putain de soirée!
Mass Hysteria
Et de 5 ! Oui, cinq participations au Hellfest pour les Mass ! Rien que ça. Et le moins que l’on puisse dire c’est que ce combo draine avec lui un engouement et un état d’esprit « positif à bloc », comme le hurle le « furieux » Mouss.
Le concert est tout simplement dantesque.
Le tony truand « Mass Veritas » ouvre les hostilités alors que je suis trempé jusqu’au slip, les premiers rangs dégustent ! Pluie, monde, ça pousse, ça sert et maintenant la scène préparée avec ce pit pour Metallica permet à l’équipe des Mass, d’évoluer devant le public pour une expérience immersive au plus haut point ! Nous les avons là, devant nous ! Cette impression dispositif d’une scène sur la scène engendre un afflux de public et désormais c’est bien simple : il n’y a plus un seul centimètre carré de disponible, tandis que « Positif à Bloc » nous donne le sourire pour tout le set.
Si Mass Hysteria fait partie de ces pionniers d’un metal français en français de la fin des années 90 (1997 pour être précis), les ingrédients sont désormais subtilement dosés, un peu de rap, un peu de machines, du son crade, du son lourd, une batterie qui s’est faite de plus en plus précise avec le temps et une expérience boostée par de bien belles premières parties (Metallica, Machine Head notamment). Les guitares brillent et les productions sont claires et puissantes.
Autant le groupe a opté pour plus de modernité sur ses dernières productions, autant sur scène, on sent toujours cette spontanéité et cette proximité avec le public toujours ravi « d’en être ». Vous savez, cette impression, de ne pas être mis à distance malgré le succès. Et bien les Mass savent intégrer le public à leur grande table.
« Nerf de boeuf » en remet une louche sur ce chaos généralisé qui règne désormais dans le pit, s’ensuivent les go-to : « Reprendre mes esprits », « L’enfer des dieux » et sa bande-vidéo de circonstance à propos du fanatisme, d’où qu’il vienne. Le message est, on ne peut plus clair.
Ce refrain qui résonne d’une seule voix dans le public, c’est quand même quelque chose! « Si l’enfer des Dieux c’est leur amour des hommes, l’enfer des hommes, c’est leur amour des Dieux ». Très philosophique tout ça. D’ailleurs, tiens, les profs de philo devraient en prendre de la graine car visiblement, ça marche davantage de réfléchir avec un texte des Mass qu’un poussiéreux Kant. Bref !
Les textes chantés en français, y’a pas à dire, ça fonctionne pas mal ! Chapeau bas de ne pas avoir plié sur cette question.
On ne va pas vous faire l’article, le concert était en tout point enthousiasmant et les titres apportent des sourires par palette, un peu à l’image d’un Mouss remonté comme un coucou Suisse malgré cette pluie qui déferle littéralement, au point que la scène en devient limite dangereuse.
Quel concert, quelle présence, quelle énergie !
Bruce Dickinson
Si je devais résumé la présence du monstre Dickinson ainsi, je dirais : Mystique, cynique poétique. En ce début de soirée il n’est pas tout-à-fait 22h00 et il pleut comme vache qui pisse tandis que retentissent les notes de… « The Invaders »! Il a de l’humour Bruce.
Après un excellent dernier album The Mandrake Project, c’est « The Accident of Birth » qui ouvre le bal sur des tonalités bleues et un Dickinson maitre de cérémonie qui tient le public en joug avec cette attitude toujours théâtrale et ce français de très bonne qualité. Il faut dire que la compagne du britannique étant française, cela doit aider à travailler les bonnes bases qui sont les siennes (souvenez-vous du Real Live One).
S’ensuit l’excellent « Abduction » du non moins excellent album de 2005 Tyrannie of Souls.
La set-list de ce soir est pour le moins satisfaisante pour qui aime la carrière du chanteur de la vierge de fer, en allant piocher de manière transversale dans des morceaux de choix.
Il faut dire que cet « AFterglow of Ragnarok » passe plutôt très bien l’épreuve de la scène et chose étrange : il ne pleut plus à la fin du titre ! Mystique hein?
Pour les amateur de mélodies moins complexes et peut-être plue efficaces, ce disque est pour vous. Dickinson fait ce qu’il sait faire en restant efficace, simple et accrocheur comme jamais. bref tout le contraire de son autre groupe !
Même si la forme de Dickinson, ce soir, est olympique, il s’avère que le public attend Metallica et le britannique a compris et s’en amuse en faisant languir le public et prenant la parole, en nous balançant ça et là : « Au fait ce soir, il y a un groupe que vous attendez après hein ? ».
Comme pour mieux annoncer le GROS morceau de la journée, l’impressionant Dickinson assène un gigantesque « Darkside of Aquarius » pour que l’on n’oublie pas quel vocaliste il est.
En totale cohérence avec le concert de ce soir, le groupe a finalement donné un concert d’une très grande qualité sonore outre la performance d’un Dickinson, les parties de guitares mélodiques et la frappe immense du batteur, ont ajouté une dimension puissamment rock à l’affaire.
Je dis ça comme ça mais si d’aventure la vierge de fer n’avait plus grand chose d’intéressant à dire, ça ne serait pas le cas de son chanteur. Dont acte.
Metallica
Bon. Je ne vais pas tourner autour du pot. La prestation de Metallica n’était pas très bonne. Mais voilà : c’est Metallica. Toutefois, la présence d’un James Hetfield et du très charismatique Robert Trujillo remonte toute cette prestation ! Je m’explique.
Un concert un peu en dent de scie pour plusieurs raisons : une pluie froide pendant près de 4 heures, s’est abattue sur notre crâne. Lorsque Les 4 cavaliers arrivent, force est de constater l’absence d’écrans pour le public du fond.
Pour les chanceux qui sont tout devant pas de problème mais pour les autres c’est compliqué. très compliqué. C’est simple, les écrans en fond de scène diffusent des images de câblage électrique et d’enceintes mais pas celles du concert? Quelle drôle d’idée. Autre problème, il a plu énormément et les enceintes sur la petite scène du devant ont gravement morflé. Du coup, le son est approximatif et par moment on se demande si les zicos entendent ce qu’ils jouent.
La set-list de ce soir se décline autour d’anciens titres, pour ne pas dire de hits : « For Whom the Bell Tolls », « Enter Sandman », « Seek and Destroy », « One », de nouveaux titres : « 72 seasons », « Lux Aeterna », « Too far to Gone » et de bizarreries, la reprise d’indochine, un « Nothing Else Matters » totalement aux fraises avec ce moment lunaire où tout le groupe se rend compte de la catastrophe. Mais voilà : James hetfield est et restera à tout jamais (amen!) un putain de frontman et là, se créer une dissonance cognitive inexplicable qui m’amène à dire que ce concert était tout-à-fait génial (il faut dire que votre serviteur était on ne peut mieux placé) grâce à une attitude ultra sympa du combo mais surtout grâce à cet enthousiasme de l’équipe dans son ensemble.
On a l’impression d’assister à une répète géante avec des ballons gigantesques qui nous tombent sur le crâne et cette petite scène qui permet au groupe de venir au plus près des festivaliers, ce qui rajoute à l’affaire un sentiment de proximité. Une proximité avec, rien de moins, qu’Hetfield, Ulrich, Trujillo et Hammet. Imaginez quand même que ce bon Robert avec son comparse Américano-Danois de batteur, ont saisis l’appareil photo d’un festivalier pour faire des selfies et des grimaces, au calme, tout en lui serrant la main comme les vieux potes du bar d’à côté !
En fait le concert de ce soir, n’en n’était pas vraiment un. L’épreuve de 2022 étant passée, désormais Met joue à domicile ! Le concert de ce soir ressemblait davantage à une réunion de vieux potes qui rejouaient ensemble avant d’aller ce taper une entrecôte frites au troquet du coin.
N’empêche que tout le monde a la banane accrochée sur la tronche détrempée. N’est-ce pas ça aussi un bon concert? Le temps tranchera.
Ne partez pas ! Je posterai la journée de dimanche avec une petite surprise !