(Interview réalisé par Emmanuel le 25 juin 2022 au Hellfest)
En cet après-midi pluvieux du 25 juin 2022 j’ai rendez-vous avec Alain Clément, guitariste de son état et membre fondateur du combo trash de No Return. Je ne boude pas mon plaisir car j’ai évolué en culottes courtes avec ce groupe.
De quoi sera fait ce nouvel album ? Quels sont les ingrédients qui permettent aux franciliens de se maintenir – encore et toujours – à ce haut niveau d’exigence qui est le leur , album après album, et cela depuis 33 ans? Excusez du peu! Explications.
REQUIEM sortira le 21 octobre 2022
1.Quel a été votre processus d’élaboration au cours de toute cette pénible période « pandémique » qui a du rendre complexe la construction de cet album?
Effectivement avec la covid, se voir et répéter les nouveaux morceaux, a été compliqué et a impacté les délais qu’on s’était fixé. On a donc composé cet album au cours des deux dernières années en faisant ce qu’on a pu en fonction des différents confinements. Ceci dit, on est très content car on a pu bien peaufiner cet album. Ça a aussi été l’occasion du retour de Steeve!
2. D’ailleurs quelles ont été les circonstances du retour de Steeve – ancien membre – et chanteur de 1999 à 2003 sur les deux albums Self Mutilation et Machinery ?
Steeve m’avait contacté il y un petit moment déjà. Il y avait comme un petit goût d’inachevé depuis Machinery. Aussi on a pris le temps de discuter et on s’est dit que ça serait super de rétablir des bonnes bases pour réaliser l’album le plus performant possible.
2. (bis) D’autant que vous aviez fait des auditions il me semble?
Oui en effet. Mais je savais que Steeve ferait bien le job comme par le passé. Il fallait simplement se mettre d’accord sur savoir ce qu’on voulait faire et où nous voulions aller.
3. Toi qui es « le gardien du temple » du groupe, quelle est l’implication des autres membres dans le processus général de création?
Souvent au niveau des compos, c’est le guitariste et moi qui amenons les riffs de base et la musique en général. On a donc un schéma de base. On propose tout ça aux autres par le biais de fichiers et de petites maquettes qu’on s’échange par internet et c’est seulement après que tout le monde a pu écouter ce premier jet qu’arrive le gros travail d’arrangement et de structures des nouveaux morceaux. D’où l’intérêt d’avoir une idée de base assez précise notamment au niveau de la partie rythmique basse/batterie à partir de laquelle ils peuvent bosser les morceaux qui sont envoyés.
À ce moment seulement, on peut voir ensemble s’il y a des choses à changer ou réarranger en profondeur. Bien sur c’est la guitare qui amène la composition même du riff de base et du morceau, comme je te le disais, mais le travail de chacun a son importance au niveau de la structure d’un morceau qui, au stade de la mise en place, peut considérablement évoluer. Nous faisons des maquettes pour que chacun comprenne bien la direction dans laquelle il doit aller dans les différentes parties du morceau, c’est là aussi qu’on travaille avec des fichiers guitar pro (Logiciel d’édition pour composer notamment) pour que chacun puisse bosser avec précision. C’est seulement à ce stade, qu’on se retrouve en répète, une fois que chacun s’est bien imprégné des morceaux? C’est aussi un vrai gain de temps.
4. No Return fêtait ses 30 ans en 2019, aviez vous pensé (avant la pandémie) à faire une réunion avec certains des anciens membre iconiques du groupe?
On avait déjà fait quelque chose en 2019, la tournée pour enregistrer l’album live, on avait fait venir l’ancien chanteur de la période Psychological mais aussi Moreno ainsi que l’autre guitariste qui était là à l’époque de Steeve.
5. Pourquoi les premiers albums sont si difficiles à trouver (en cd)? Je pense notamment à Contamination Rises et Psychological Torment qui tournent parfois à plus de 100e sur Discogs?
Exact, j’ai vu sur Ebay 70 ou 80 euros pour certains de nos albums.
En fait les deux premiers ont été réédités sous la forme d’une compilation Psychological Contamination. On les a remasterisé mais c’est vrai que les originaux coutent une fortune et le troisième Seasons of Soul est devenu très difficile à trouver. On va essayer de remettre ces trois albums sous la forme numérique sur différents réseaux pour que le public qui ne connaîtrait pas encore ces albums puisse se les procurer à un prix raisonnable.
6. Comment décrirais-tu l’évolution de No Return, en termes de régularité au cours de ces 33 ans?
La sortie des albums a vraiment été différente en fonction des années mais aussi de la conjoncture, je pense notamment à la pandémie, qui nous a fatalement ralenti. Je dirai que l’idée au cours de ces trois décennies a toujours été de garder la trame propre au trash et au death metal surtout au niveau du son des guitares. Notre essence est faite de ce mélange de mélodies et d’agressivité au niveau des guitares. L’aspect mélodique a cependant été renforcé au cours des années tout en conservant toujours des aspects fondamentaux comme les chorus et solos qui sont la génétique même du groupe.
7. La pochette de Self Mutilation et Machinery ainsi que celle du nouvel album semblent être en continuité avec l’ère Steeve, était-ce voulu?
Oui bien sur que c’est un clin d’oeil! Steeve revient dans le groupe et c’est aussi lui qui a fait l’artwork! On revient avec un album qui poursuit, en quelque sorte, la même lancée du début des années 2000 mais ferme aussi la boucle avec son retour.
8. Le nom de Requiem fait à la fois penser à l’ère troublée de notre époque mais aussi à des funérailles, vous ne signez pas votre « requiem », rassure-moi?
Non pas de requiem, pas de soucis là-dessus! C’est vraiment dans la thématique de cette triste époque et un bilan de notre société. On parle de ce qui va plus ou moins mal. D’ailleurs dès le 1er album nous évoquions tout cet aspect sombre du monde : l’avidité, la corruption, l’esclavage, la mondialisation, les dérèglements politiques. Bref ces thèmes sont malheureusement toujours là. En quelque sorte nous faisons un constat des choses qui vont mal.
9. On peut dire que le son de No Return aura traversé l’époque du son sec « floridien » mais aussi celui de l’influence « batave » à la Pestilence des années 90 pour arriver à un son résolument plus moderne – incisif –, ce qui s’inscrit dans la continuité de ce qu’est devenu le trash non?
Je pense qu’on a bien travaillé cette question du son, c’est correct. Pas seulement au niveau des guitares mais également, avec notre ingé son qui a vraiment bien bossé et qui connaît bien le groupe. Nous avons mis l’accent au niveau de la batterie car dans ce style de musique c’est vraiment important mais c’est aussi important de savoir évoluer! C’est évident qu’on album de 2022 ne peut pas sonner comme un disque de 89.
10. En réécoutant la période Steeve je me suis rendu compte qu’il y avait aussi une présence marquée des machines, un côté un peu « indus », est-ce qu’on peut s’attendre à voir réapparaître ce type de sonorités pour le prochain album?
Je pense que c’est important d’agrémenter le trash avec des samples pour mettre des ambiances, ça rajoute quelque chose qui se mêle très bien à la musique de No Return sans forcément verser dans l’indus. Dans le nouvel album il y aura bien sur, ça et là, des plages samplées, des intros qui traversent l’espace sonore, encore une fois, sans que ceci prenne le pas sur la musique.
11. Est ce qu’il y a des groupes anciens et nouveaux dans lesquels vous puisez aussi?
J’écoute toujours « la référence incontournable » qu’est Death mais j’aime beaucoup finalement les vieux groupes de Heavy, très différents de ce qu’on fait avec le groupe comme Whitesnake, Alice Cooper, Skid Row, ce style de rock me plaît aussi beaucoup. Pas grand chose à voir avec No Return! De plus, Deficiency est pour moi la référence du trash moderne français.
12. Est-ce qu’il y a déjà des dates qui sont déjà prévues pour valoriser l’album?
Oui, Le premier single sortira fin juin début juillet (NDR : interview réalisée en juin mais qui ne parait que maintenant pour des raisons de cohérence avec la promotion du nouvel album) et on fera quelques concerts fin 2022 mais le gros de la promo se fera en 2023. Avec la pandémie le booking est devenu complexe, et cela encore plus aujourd’hui.
Merci à toi pour ta disponibilité je me réjouis de vous voir sur scène.