Les gens en ont marre des festivals, dites-vous ? Marre parce que trop de ceux-ci, trop souvent, trop vite informés, trop le rush aux caisses de pré-locations, trop de monde qui sont là "juste pour bouffer une saucisse et pour l’ambiance" ? Allons…
A Pully, c’est l’Eden. Tout le monde sourit à tout le monde, on s’arrête tous les 10 mètres pour discuter avec son prochain, on se fout de la pluie, on est content d’être là, notre hot-dog spécial mayo-ketchup-moutarde, notre bière et notre clope dans les mains.
Sylvain Chauveau & Ensemble Nocturne ouvre le bal avec des ballades atmosphériques, plus des reprises de Depeche Mode, version orchestre de chambre. Bonne surprise pour le public, néanmoins les cris sont un peu mous à la fin des morceaux. Il faudra que des Américains viennent le réveiller, car c’est au moment où The BellRays entrent en scène que tout commencera vraiment. "We’re The BellRays" lance Lisa Kekaula avant que ne déferlent les décibels, l’électricité, le groove qui transpire, le rock qui crache, le rythm’n’blues suramplifié ! C’est une véritable centrale nucléaire qui est sur scène ce soir ! Le groupe enchaîne les titres à grande vitesse, Bob Vennum (basse) saute partout malgré son grand âge, Lisa nous réchauffe de sa voix soul et s’adresse à un public qui ne les connaissait pas forcément mais qui paraît très intéressé. Grande surprise, les New-Yorkais interprètent "Les Cornichons" de Nino Ferrer. Lisa avec un accent presque parfait se marre et les autres interprètent le titre français avec rage, souplesse, hargne, sagesse. On vole littéralement dans la stratosphère rock’n’roll ! Le batteur a même revêti un T-Shirt rouge à croix blanche pour l’occasion. C’est la fête, tout le monde l’a compris, les rangs sont de plus en plus serrés, les mains sont de plus en plus nombreuses à fouetter l’air et les cris de joie de plus en plus prononcés. Nous aurons droit à un set complètement hard, et heureusement, sachant que le groupe compte trois différents sets pour cette tournée, parfois d’un calme anesthésiant. Interview.
Motorpsycho entre en scène. Le groupe porte très bien son nom, à savoir Motor- = disto écrasante, stoner ébourriffant et -psycho = ça ne s’invente pas, on devrait tripper assez facilement là-dessus. Mais c’est surtout les irréductibles fans qui sont au-devant de la Grande Scène, car le côté répétitif de la chose lasse passablement le lambda venu même par pur intérêt rock’n’roll. Alors on se déplace à la scène Abraxas pour découvrir la performance de Hell’s Kitchen. Et là, on découvre comme l’attirail d’un vieil ermite sur scène: du bordel amassé dans des marché aux puces et autres, à savoir: pelle, roue de machine à laver, contrebasse-poubelle, poubelle tout court, bref, ceux ne connaissant pas le groupe ne pigeaient pas bien ce qui allait leur arriver. Le groupe entre en scène et, pessimiste extraverti plus qu’enthousiaste de voir tout ce monde, le chanteur lance "Merci d’être si nombreux ! C’est parce qu’il pleut dehors, n’est-ce pas ?" Pas pour tout le monde mon gaillard… Certains savent ce dont Hell’s Kitchen est capable en studio, mais veulent tenter l’expérience live. "Jack is a Writer", "My House" et quasiment que des bons titres y passent. Nous sommes chauds et le groupe l’a, cette fois, compris et donne le meilleur de soi-même dans une country décalée, festive parfois, mais terriblement noire et dégoulinante de mal-être. Un peu comme un enfant de 16 Horsepower et Tom Waits. On nous gratifie même d’une version country de "These Boots Are Made For Walkin’", à l’origine écrite par Lee Hazlewood et interprétée par Nancy Sinatra.
A la fin, plutôt que d’aller voir Celtic Frost avec son équipe de maquillés, on préfère s’envoyer une baked potatoe à la crème et aux lardons avec une dernière bière avant de prendre la poudre d’escampette.
Pully toujours…
Photos par Alain Groux
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