Mr Eleganz


 

De passage au Printemps de Bourges, Mr Eleganz a pris le temps de répondre à quelques questions juste après son DJ set. Extraits choisis d'une conversation sur un banc au beau milieu du Berry.

Lords of Rock : Le festival a démarré depuis quelques jours, comment tu te sens ?

Mr Eleganz : Ça va, je rencontre pas mal de gens que je connais. Ce qui est bien ici c’est que tu croises tout le monde. Professionnellement parlant il y a un intérêt, mais artistiquement il n’y en a aucun. C’est un peu le Flunch des festivals : c’est pas cher, mais c’est pas bon.

Pourtant vous êtes tu es venu plusieurs fois avec Success ! Ça ne vous a rien apporté ?

Il y a quatre ans c’était génial, on était sur la grande place, c’était gratuit, il y avait du monde. Moi j’adore les concerts gratos. Le côté kermesse quand on a les bonnes conditions, c’est génial. Après il y a deux ans c’était moyen. On a joué trop tôt et sur une scène isolée…

Existe-t-il encore au moins des festivals de découvertes ?

Ah si, tu prends les Transmusicales c’en est un.

D’ailleurs comment vous vous êtes retrouvés en Asie pour une tournée ?

C’est la combinaison de plein de choses. A un moment un attaché culturel au Laos qui nous a découvert aux Trans, il a essayé de monter une tournée en 2008, ça n’a pas marché, il a insisté en 2012 et ça a fonctionné. A chaque fois on nous fait “Faites attention, ici le public est un peu froid”, mais on arrive toujours à tout renverser. On est les crêpiers du rock, les gens on les prend, on les retourne. On a joué dans des théâtres et dans des cinéma ou au début tout le monde est assis, à la fin tout le monde est debout. Il faut avoir le truc sur scène et nous on l’a. Après rentrer chez soi et écouter le même groupe dans son salon c’est autre chose. Tu vois les autres gars de Success étaient dans le groupe Percubaba avant. C’est pas vraiment mon truc, mais en live tu es emporté, c’est un tsunami. Ce qu’ils faisaient parlaient à tous les ados de 16/17 ans. Que ce soit il y 20 ans, ou maintenant. Et malgré ça il avaient une mauvaise image auprès de beaucoup. Quand on a commencé Success, on nous a prévenu de ne surtout pas dire que les autres venaient de Percubaba. Ça faisait pas bien. Vaut mieux être un hipster peut être.

Toi aussi tu as de l’urticaire à leur contact ?

Ah mais je n’ai rien contre les hipster. C’est juste que, quand ils feront un bon concert, je leur serrerai la main. Nous en avons enterré je ne sais plus combien. Le nombre de groupes qui arrivent sur scène en étant des stars dans leurs chambres… et là on leur met une misère, ça les dégoûte de la musique.

Tu brises des carrières musicales peut être !

Du tout, je préserve le public. Les gens qui paient pour concert veulent voir un show. Ils n’ont pas envie de voir un trou de balle qui joue à la xbox faire n’importe quoi sur scène. En plus ces mecs là ne tiennent pas la route. Ils coûtent certainement plus chers que moi !

Bon, du coup on en live vous êtes fantastiques, mais votre premier album ?

Ça a été un flop en France. Il faut être clair. A un moment donné, un groupe qui fait entre 130 et 150 dates en France, plus une soixantaine de dates dans 21 pays ce n’est pas normal. Il y a un vrai décalage. Chacun peut se reporter la faute mais le fait est là. Le disque n’a pas marché. On s’est posés des questions, peut-être que le disque part dans tous les sens? Pour le prochain on essaye de tenir une ligne de conduite plus rock.

Pourtant sur SOCIAL NETWORK JUNKIES tous les morceaux s’inscrivent dans une lignée électro-rock ! Tous vos morceaux tabassent.

Il y a plein de gens qui nous disent que sur l’album il y a 5 ou 6 tubes. Après il faut l’entourage. On est chez BMG, l’éditeur numéro un. Le jour où ça bascule, on a l’accompagnement éditorial. On a le potentiel pour basculer. On a fait les trois premières parties de Garbage, Butch Vig nous a demandé de les suivre sur toute la tournée américaine… mais on a pas pu pour une question de budget. Ce type a fait NEVERMIND, qui produit Smashing Pumpkins, L7, Sonic Youth, dès que Dave Grohl sort un truc tu as Butch Vig derrière. Quand un gars comme ça te propose de le suivre… tu pleures comme une madeleine. Sauf qu’aux États-Unis quand tu fais une première partie c’est à tes frais, eux ils font un concert dans chaque état, donc si tu veux suivre il faut débourser 50000€. A l’époque on avait personne qui pouvait mettre autant. Enfin personne qui voulait les mettre. Capable oui. Par contre si on l’avait fait…

Tu n’aurais pas été sur ce banc avec moi ?

Ah si, mais tu aurais eu une putain de gaule… Le plafond de verre que tu traverses et où tu exploses tout, on l’a effleuré mais on ne l’a pas cassé.

Vous aurez peut être d’autres occasions ?

On ne sait pas. Et si tu fais de la musique uniquement pour casser ce plafond, tu risques d’être déçu. Ce que j’aime c’est jouer devant des gens, qu’à un moment ils aient envie d’être moi. Je ne veux pas que ça s’arrête. C’est physique impossible. Je préfère aller jouer devant deux personnes dans bar, mais je ne peux pas m’arrêter de jouer. Pourtant j’ai fait toute une carrière avant ou je gagnais très bien ma vie, mais ça ne vaut rien à côté.

Tu faisais quoi exactement ?

J’étais directeur de librairie, et vraiment à deux doigts de payer l’ISF alors que là je suis à la limite du RSA. Mais c’est pas grave. Ce que je procure aux gens sur scène c’est incomparable.

Pourtant tu es assez froid avec les gens.

Oui je suis froid, distant et hautain, mais je suis comme ça dans la vie. Je ne suis pas un mec cool.

Ah si, tu connais Butch Vig, c’est hyper cool.

Mais il est pareil. C’est pas un mec cool. Dave Grohl, Butch Vig… ces mecs là sont juste sincères. En France ma plus grande reconnaissance c’est Didier Wampas.

Pourtant c’est quelqu’un qui n’a pas eu la reconnaissance médiatique qu’il méritait.

Mais c’est pas grave. Il a exactement la carrière qu’il voulait. Didier est vraiment sorti de ça. Moi non. On s’estime tous les deux. On fera quelque chose ensemble c’est sûr, mais on ne sait pas quand. On voudrait reprendre une chanson de Charles Trenet (“Le noël des enfants noirs”) et la lancer sur le marché anglais pour Noël. Ils font un concours chaque année en Décembre jusqu’au 24, la chanson qui vend le plus gagne.

Donc dans tes idoles tu as Butch Vig, Dave Grohl et Didier Wampas ?

Exactement. Tu vois, je suis un fan absolu des Stones et d’Iggy Pop, mais le mec le plus sincère, c’est Didier. Je rêve de voir à la suite sur scène Didier et Iggy. Iggy va chier dans son froc quand il va voir débarquer Didier. J’admire les gens qui savent rester humbles.

C’est la culture du buzz.

En 2010 à Rock en Seine on fait un concert énorme, on retourne tout. En conférence de presse je balance “Nous sommes la révélation de cette année”. Le lendemain tous les journalistes inscrivent ça en tête de l’article alors que personne ne l’avait jamais dit. Il suffit de se montrer à poil pour être dans quelques canards.

Le fait de bien tourner en live vous permet malgré tout de garder la confiance de votre label ?

Sakifo, notre label sur le premier album est plus que mal en point. Nous en cherchons un autre pour sortir le deuxième album

Il sera comment d’ailleurs ?

Plus rock, plus noir. Dans les textes, mais aussi dans la musique Quand tu prends l’intro de “Crazy”, on l’a modifiée plusieurs fois. Entre la première impression et ce qu’il reste, il doit y avoir une différence. On fait des choses ultra référencées. Tu regardes le clip, le dernier plan c’est “Persona” de Bergman.

Vous êtes des intellos du rock ?

Complètement, mais ça ne parait pas ! Le détail, la nuance, ça fait tout.

Vous avez un nom et une date pour ce disque ?

Pour l’instant on ne sait pas. Peut être qu’il sortira en Chine avant la France.

Ça marchera peut être différemment, ils n’ont pas l’habitude de groupes comme vous.

Ils n’ont jamais vu ça. Quand tu regardes les concerts qu’on a fait en Inde c’était dingue. On va essayer d’y retourner pour faire une petite dizaine de dates.

Mais tu vas faire partie d’un sacrifice humain !

Ça serait vachement beau de mourir sur scène. Si je ne suis pas une légende ça ne m’intéresse pas. D’ailleurs à Bombay, quand je suis descendu de l’avion, il y avait ma tête sur un taxi. Je n’en revenais pas. En fait c’était mon sosie, un acteur ultra-connu là-bas.

Ou alors tu es acteur à Bollywood ?

On m’a proposé d’ailleurs, ça peut être marrant de faire ça. Mais pour en revenir à la musique, quand on a signé chez BMG on nous a dit tout de suite “Vous ça ne marchera pas en France, mais à l’étranger oui”.

Ce n’est pas un peu décourageant ?

Non pas du tout. Tu as des groupes comme Shaka Ponk qui ont mis plus de 10 ans avant que ça marche. Skip The Use pareil. C’était un groupe bien punk avant que ça fonctionne, ils ne faisaient pas du tout ce qu’ils font en ce moment.

Et tes collègues, ça ne les emmerde pas de ne pas monter sur les plus hautes marches ?

Évidemment que ça fait chier. Mais on essaye de transmettre, d’exprimer quelque chose. Ce qu’il faut être entouré des bonnes personnes au bon moment. Quand on a fait Rock en Seine, on était meilleurs vente de mp3 la semaine suivante. Si on avait sorti l’album à ce moment là ça aurait peut être fonctionné. Mais le passé ne m’intéresse pas, ce qui m’intéresse c’est le moment présent

Espérons que votre deuxième album soit plus écouté et plus diffusé surtout. Bon courage à vous.

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