Manu Lanvin and the Devil Blues en Interview

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– Salut Manu, on te retrouve aujourd’hui ici chez Gibson à Paris et ton nouvel album est sur le point de sortir, comment te sens-tu aujourd’hui ?

Blues Booze & Rock n roll, ça doit être le 6eme album. Y'a moins la magie du premier album qui sort, quand on y croit, on a envie que tout se passe bien et on met énormément d'espoir dans les choses. En fait on se rencontre avec les années cumulées que l'histoire se joue sur la longueur, et pas sur un seul album. Ca fait quelques albums qu'on s'est rendu compte de ça, ce qui compte c'est d'être dans la durée. Voilà, nous on est un groupe de musique, on a envie de faire des live, de tourner et de retrouver notre publique, mais parfois on s'arrête et on prend une photo. On prend le temps de voir ou on en est, et les nouvelles histoires qu'on a envie de raconter, c'est ça le studio en fait. Il faut désacraliser, sinon on vit mal l'après sortie. L'industrie du disque aujourd'hui est telle, qu'il faut rester tranquille dans sa tête vis à vis de tout ça.

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– C’est déjà ton 6ème album, 16 ans se sont écoulés depuis la sortie du premier album de Manu Lanvin en solo « Venir au monde ». 16 depuis ta naissance artistique, tu trouves que le petit Manu a bien grandi ?

Ah oui il a pris des coups, des coups de la vie, des défaites aussi bien personnelles, Professionnelles, sentimentales, on grandi avec ça ! De toute façons je suis un écorché de la vie, on sort jamais vraiment indemne de nos choix. Mais mes choix je vais jusqu'au bout, j'essaie de véhiculer quelque chose de positif avec ma manière d'aborder la musique. Je mets beaucoup d'amour dans mes chansons et face au public sur scène. J'ai cette dualité que les gens qui me connaissent bien remarquent. Voilà Manu il a un côté un peu dur parfois, un peu sombre, et autant il a se coté explosif et il veut partager, aller vers les autres. C'est ce qu'on fait d'ailleurs, on prend le maquis, on va voir les gens, on fait plus de 100 dates par an. On veut retrouver et partager avec notre publique. Et ça, c'est resté intact d'il y a 16 ans. C'est une chouette vie, qu'on est en train de mener en ce moment !

– Question toutefois classique mais profonde et importante, comment t’es tombé dans le Blues ?

En général, c'est pas nous qui voulons faire du Blues, c'est plutôt le Blues qui s'installe petit a petit. Mais très rapidement j'ai eu l'envie de faire du rock, des groupes et des albums. Quand j'ai vus des Jimi Hendrix, Led Zep, Yardbirds, tous ces guitar hero des années 70, les Rolling stones aussi, bien évidement ça m'a donné envie de faire du rock n roll. Cette musique qui était déjà très empreinte de blues ! Et ces mecs-là, ils connaissent tous leurs classiques. Et bien sûr, les classiques, c'est les grands bluesman du delta, les Muddy Waters, les Robert Johnson tout ça. En même temps on a jamais fait de blues traditionnel, je fais pas du Chicago Blues, je ne fais pas du Delta Blues, je pique des choses qui me plaisent la dedans. Je fais un blues contemporain, le nouvel Album Blues, Booze & Rock n'Roll, comme son nom l'indique est un peu différent en ça. J'avais envie de dire des choses au gens, avec tout ce qui nous est arrivé cette année. Je pense au Bataclan, bien sûr, et ce sentiment avec tout ce qui nous arrive, que tout pars en sucette. Je voulais parler aux gens, être proche, et pas juste pensé égoïstement à soi.

– Lorsque tu composes quelles sont tes principales inspirations, c’est quoi les sujets sur lesquels tu préfères écrire, le Blues, la Booze, et le Rock n Roll, autre ?

C'est ça, un peu ce que je disais. Une ouverture, un peu moins centrée sur moi-même, les évènements actuels. Quand j'entends que dans une mosquée, on dit aux enfants que la musique c'est le mal et que c'est pas bien d'en faire. Y'a un truc que je ne comprends pas là… C'est pas pour autant que je vais m'énerver, comme quand on touche à un truc sacré. La musique c'est un truc sacré, la religion bien sûr c'est un truc sacré. C'est pas pour autant qu'il faut s'enflammer. Si ils savaient le bien que l'on fait ! Le bien que nous faisons, nous, musiciens. J'ai des gens qui viennent presque pleurer dans mes bras à la fin de chaque concert. Des gens qui ont des problèmes de santé, qui disent "le bien que ça nous fait de venir là". Quand on voit le bien que ça peut procurer et que ça donne des frictions comme ça, on est dans une forme l'incompréhension. L'essentiel c'est de comprendre la mécanique du malaise dans lequel on est en ce moment. Dans cet album, il y a quelques beaux messages : Raise your Hands for Peace, Blues Booze & Rock n Roll parlent de tout ça. Voilà, on a le droit de sortir le soir, de prendre plaisir avec ses amis, d'écouter tranquillement le dernier album de Radiohead sans que y'ai quelqu'un qui viennent foutre le bordel dans le bar. Pour moi, les Beatles ont donné de la lumière et du soleil aux gens, Radiohead aujourd'hui aussi en donne. Il ne faut pas être méprisant comme ça, des gens qui font le bien, parce que c'est ça.

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– Il y a des rencontres qui sont déterminantes dans la vie d’un artiste. Ta rencontre avec Calvin Russel et l’album que vous avez coproduit est-il un des moments les plus décisifs de ta carrière ?

Il l'est ! Bien évidemment ! Parce que cet album à marquer un virage, et il m'a aidé à me décomplexer, sur le fait d'assumer le fait que j'avais envie de faire du blues et du rock n roll. Que j'étais très animé par la culture anglo-saxonne. Le système des maisons de disques français ne savait pas trop ou me ranger. Et cette collaboration m'a permis de me trouver et de pouvoir l'assumer. Cet album qu'on a co-composé c'est clairement devenus une force. Quelqu'un comme Calvin Russel qui n’avait jamais travaillé en commun sur un projet, qui accepte de co-composer un album comme celui-là, ça donne de la force. S’il croit en moi…. Quand quelqu'un crois en toi, ça te donne de la force, quoi qu'il arrive. Comme des parents avec l'éducation de leur enfant, si les parents croient en eux, ça leur donnera une très grande force. Cette collaboration qui a donné DAWG EAT DAWG ça m'a permis de mieux grandir et de m'affirmer dans ce que je voulais faire. La suite des albums, sont vraiment dans cette couleur que nous avons développé dans DAWG EAT DAWG. C'est pas innocent, lui, était complétement dégouté des maisons de disques je me souviens. Et moi je venais de me faire virer de la mienne avec perte et fracas en me disant de changer de métier et tout… C'est horrible ! Mais c'est lui qui m'a donné cette force-là, d'y croire de nouveau, et on a fait un bel album. Et c'était une très belle rencontre.

– Le Blues est un style musical qui se partage sur scène, quand tu en as l’occasion tu le vis et le partage pour le plus grand plaisir du publique. Je pense à ta collaboration en tournée avec Neal Black, des featuring avec Paul Personne, avec Ladell Mclin, avec Johnny Gallagher, les Paname Blues Night avec les Potes du Blues Français actuel comme Gaëlle Buswel et Blues Power Band. Est-ce qu’il y a des personnalités du Blues avec qui tu rêves de jammer sur scène, des grands des petits, des gens que tu connais ou des gens que tu ne connais pas encore ?

Y’en a plein !!!! Tellement ! J'aimerai croiser le fer avec tout le monde. J'ai redécouvert une phase de Clapton qu'on oublie assez facilement, c'est la période Dereck & the dominos. Clapton chantais comme jamais, et avec un son de gratte qu'on reverrait tous d'avoir. Eric Clapton y'a des périodes que j'aime moins bien sûr, mais je me suis fait cette réflexion-là : mine de rien, ce gars-là, il les a tous croisés ! Il doit avoir des anecdotes et des histoires sur tout le monde. C'est ptet pas de jouer avec lui qui serai top, ce serai plutôt de le rencontrer et de pouvoir partager un peu de temps avec lui. Juste de l'entendre raconter des histoires tu dois tellement apprendre. Après ; une guitare c'est un moyen d'échange, et c'est bien aussi d'échanger de manières différentes. En général, j'aime me rapprocher des gens plus vieux que moi. Parce qu'ils ont toujours un truc à t'apprendre. Je suis autodidacte, j'ai appris la guitare et la musique tout seul. Et les plus anciens peuvent toujours prendre le temps de t'expliquer un truc. Je suis au grand regret de ne jamais m'être retrouvé avec BB King. Je suis sûr qu'il avait tellement à échanger. Tout le monde d'ailleurs, je pense, voudrait s'être retrouvé avec lui. Des gens comme BB King, c'était des gens qui avaient juste envie de donner. Keith Richards aussi, tu vois. Juste quelques petits conseils, putain laisse tomber se serai déjà énorme.

– Au début de ta carrière tu ne composais le Blues qu’en Français, ton dernier album Blues Booze & Rock n Roll n’est quant à lui chanté qu’en Anglais. Tu penses qu’il y a eu une évolution dans ta façon de composer et d’écrire des paroles ?

On m'a tellement parlé de Quotas pendant des années. Les maisons de disques tout ça, il faut faire un quota de morceaux en Français. Moi j'aime écrire en Français, peut-être même que le prochain album sera écrit en Français. N'empêche aujourd'hui c'est juste propre au Devil Blues. Notre but c'est de tourner, en France mais aussi à l'étranger. On force un peu les choses pour aller à l'étranger. ‘Faut pas croire qu'on vient nous chercher tout le temps. Quand on a l'occaz’ d'aller jouer pour Quincy Jones à New York, bien sûr c'est ouf. Pour autant on force des portes pour aller jouer ailleurs, on a envie de jouer toujours plus et toujours plus loin. Et pour ouvrir ces portes, à un moment il faut utiliser une langue universelle, qui est l'Anglais. Il faut que les gens puissent comprendre les textes, là où je veux les emmener et qu’ils comprennent ce que je veux leurs dire. Tout en sachant qu'on peut toujours faire quelques chansons en Français, c'est charmant le Français à l'international. Mais un concert qu'en Français… Charles Aznavour pour se le permettre, Jacques Brel, des gens comme ça, mais c'était une autre époque.

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– Comment s’est créé le Devil Blues ? Tu as vendus ton âme sur les crossroads lorsque tu as fait ton voyage dans le Delta ? Le diable t’a collé une section rythmique tout droit venus de l’enfer ?

Nan il ne m’a pas collé une section rythmique directement des enfers. Mais, c'est plus un pacte que j'ai été faire la bas. Un pacte avec moi-même, c'est suite à la mort de Calvin d'ailleurs. Je me suis dit, voilà, c'est le choix que j'ai fait, il faut être passionné pour faire de sa vie la musique. La réalité c'est qu'on ne vend plus des millions d'albums, surtout dans cette musique-là. La motivation c'est plus la réussite financière, même plus la réussite tout court. C'est un choix de vie, et dans ce genre de choix, il y a des hauts et il y a des bas. Le fait d'être partis la bas, eh bien j'ai compris pourquoi la bas les mecs ils ont fait le choix de prendre la guitare et de tenter ce qu'ils ont tenté. Ils avaient le choix, d'aller travailler dans les champs de cotons, et de gagner 1$ par semaine, ou bien d'animer une soirée et de se faire 3$ par soirée. C'était leur passeport pour la liberté. Je suis rentré fort de ce voyage et j'ai compris que c'était aussi mon histoire.

– Qui sont les artistes qui t’ont le plus inspiré ?

Skip James, bluesman dont j'adore la voix, l'esprit, qui passe du mineur au majeur. Beaucoup d'artistes de Soul, je pense à Otis Redding, Al Green, c'est des mecs qu'il faut écouter de toute façon. Clapton dans Dereck & the Dominos on sent d'ailleurs qu'ils se sont vraiment inspirés des artistes de soul, comme Joe Cocker plus tard. BB KING est un exemple hallucinant parce qu'il a lié deux forces : il a réussi à être aussi puissant dans le registre guitaristique que dans le registre vocal. Et ça c’est très, très rare ! Je pense que c’est simplement le meilleur qu’il y a eu. Tu vois par exemple, Steevie Ray Vaughan, c’était un tueur à la gratte, il chantait bien, mais il y avait toujours plus de niveau à la guitare et avec son phrasé qu’au niveau du chant. Hendrix, pareil ! Et après t’as l’inverse, t’as des super chanteurs qui ont moins de niveau à la guitare. Non, BB KING, il a su trouver l’équilibre entre tout ça. C’est le meilleur !

– Ton top 5 des plus grands Guitaristes ?

Oh, j’adore Dereck Trucks ! Il défonce au bottleneck !! Bien évidement Hendrix pour la folie, il a réussi à révolutionner la guitare électronique. J’aime beaucoup J.J.Cale, c’est un mec qui a réussi à avoir un touché très personnel, une façons vraiment unique de jouer. BB KING en fait partis, c’est obligatoire. Voilà, ça en fait 4, et si je devais en nommer un cinquième. Je dirai Bob Brozman, un tueur au dobro !

– Let’s Talk Booze ! C’est quoi la boisson préféré du Devil Blues ? A quoi vous tournez quand vous êtes en tournée ?

J’aime bien le Whisky Japonais, mais une bouteille de Jack Daniels fait très bien l’affaire !

– Est-ce que tu as un St Graal du matériel musical ? Un ampli, une guitare de rêve, un micro ou autre ?

Une guitare de rêve, moi je kiffe les grattes avec des P90. Si tu me sors un couple parfait Guitare + micros P90 bien gras, je prends tout de suite !

– Quels sont les groupes que tu écoutes en ce moment ?

J’écoute Trigger Finger ! Rien à voir tu vois, mais il y’a beaucoup d’énergie, je trouve que ça a vraiment de la gueule. Rival Sons aussi, le chanteur assure grave. Alabama Shakes, grande chanteuse ! J’écoute beaucoup de Gary Clark Junior, je n’aime pas tout de ce qu’il fait. Mais quand il reste sur des codes qu’on connaît c’est vraiment bien. Ces reprises de Catfish Blues et autres dans le genre c’est juste super !

– En tant que pirate de la musique et du Blues Français, tu fais ton chemin seul, loin des strass des médias, loin des effets de comm vide de sens, que penses-tu de la position des medias français et des radios majeures vis-à-vis de la musique actuelle ? C’est sûr qu’on n’est pas forcément servit, qu’on n’est pas forcément aidé. Mais en même temps, est-ce que c’est notre rôle d’aller sur TF1, et de faire du blues sur des chaines majeures ?

Je ne sais pas. Je sais qu’il y a un réseau qui existe, avec qui on travaille beaucoup, on est aidé aussi par ce réseau et on arrive à tourner avec ça. Je sais qu’il y a des gens passionnés par la musique authentique. Pas que le Blues hein, le Rock aussi, la Soul etc… des gens qui aiment la musique authentique, il y en a ! Il y a plein de festivals qui programment de la musique authentique et qui ramènent plein de gens. Nous, parfois on a halluciné, quand t’as des festivals qui jouent la carte du Blues, ça fonctionne toujours très bien ! Alors oui, on prend le maquis, mais est-ce que d’aller faire le guignol chez Arthur ça aiderai la chose ? Il y a de moins en moins d’émissions ou on fait du Blues… mais on va peut-être y arriver ! Dès qu’on nous laisse l’occasion, on la saisi, et on sait que le Blues c’est aussi une musique qui peut plaire au public populaire, pas forcément au public initié.
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– Si tu n’avais pas été un musicien, que serais tu devenus ?

Je serai devenus un brigand quoi …. Ah oui, j’aurai fait le con je pense. Je n’aurai pas tué ! Attention, mais j’aurai été un pirate quoi. C’est un peu un pied de nez au système de vivre de la musique déjà, je vais pas au boulot à 8H, je ne sors pas du boulot à 18H, je suis déjà un peu un brigand, un marginal. Je pense que j’aurai été comme ça de toute façon.

– Quel est ton album préféré, The Best album, l’album que tu emporterai dans ta tombe ?

Wah wah wah, c’est dur ça…. Un seul putain… franchement, tu pars seul sur une ile déserte, loin de tout, c’est pas le moment de ce mettre du Robert Johnson ou du BB King. Tu te pends peu de temps après, ça n’a aucun sens. Je pense que je prendrai du classique tu vois, tiens, du Rackmaninov voilà. Un truc qui fait du bien !

Merci Manu pour cette interview, c’était un grand moment. Bon courage pour la tournée qui démarre et la promo du nouvel Album Blues Booze & Rock n Roll ! Nous te souhaitons pleins de bon live, et on te dit à Bientôt !

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2 comments

  1. Je pensais que les journalistes étaient encore garants du respect de la grammaire et de l'orthographe. Mais là, ça fait peur sur certaines phrases. Je parle de contre-sens sur certains mots, et pas du respect pur et simple de l'orthographe. S'il vous plaît, faites un peu plus d'effort que le dictionnaire word. Merci.

    Sinon, pour le fond, l'interview. C'est OK. Allez Manu.

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