Gagnant rapidement ses gallons de groupe culte, Deerhunter poursuit ses croquis d'un rock sans véritable destination, entre noise, ambiant et psychédélique. Après l'excellent Microcastle, le quatuor explore d'autres pistes et semble encore meilleur. Chronique.

Deerhunter

INDIE ROCK Gagnant rapidement ses gallons de groupe culte, Deerhunter poursuit ses croquis d’un rock sans véritable destination, entre noise, ambiant et psychédélique. Après l’excellent Microcastle, le quatuor explore d’autres pistes et semble encore meilleur. Chronique.

Un question
de hasard, ou de destin, c’est selon : en VF, le fameux film de Michael
Cimino du même nom s’est fait traduire ”Voyage au bout de l’enfer”. Après tout,
la tête pensante de Deerhunter groupe conjuge autant le tragique – une maladie
saumâtre – que le sublime. Bradford Cox semble en effet rejoindre les
intouchables de l’indé intelligent, aux côtés de Panda Bear, David Sitek, Ariel
Pink ou Patrick Watson. Des maîtres de l’orchestration barrés, dans la droite
lignée de ce qui se faisait de mieux il y a bien trop longtemps. De cette
époque, ces derniers ont néanmoins su s’en détacher pour donner un brin de
crédibilité artistique à nos années démunies. Après l’incroyable double
MICROCASTLE / WEIRD ERA CONT, Cox rassemble sa division d’Athens, Géorgie, pour
un album qui, mine de rien, fait partie des grosses attentes de 2010. Et l’on ne va pas faire planer le suspense durablement en classant ce LP dans les “must have” de l’année, réunissant épris de pop céleste et de rock glacial.

Le corps et l’esprit

”Earthquake”,
dépouillé, semble être un croisement entre Brian Eno (vidéo) et Neil Young. Ca pourrait
être l’épilogue du quatrième album de Deerhunter, ce n’en est que le début. La
suite est tout aussi déroutante, mais brillante. Pourtant, on l’avoue, on avait
pris ce disque par deux angles obtus, plus accrocheurs, histoire d’entrer en
douceur dans ce savoureux tableau : le titre promo, ”Helicopter”, élégante
ritournelle toxique à la production hors normes pour le jeune homme de 28 ans,
et le goguenard ”Desire Lines”, lançant son parcours psyché sur les mêmes bases
que ”Rebellion Lies” d’Arcade Fire. Le résultat sera tout autre : sous ces
chœurs et ces guitares aériennes se cache la crasse, la divagation, et un final
déglinguant, préfigurant des prestations scéniques écarlates à botter en touche
le flegme des Brian Jonestown Massacre. Pas bête : on dirait du
Dandy Warhols première époque – dorée – quand le plan de carrière se conjugait
avec des concerts hallucinants durant plus de trois heures. Deerhunter en sont
capables, s’ils ne se perdent pas en route – vous savez où.

 


HALCYON DIGEST se hasarde cependant dans des choses moins
nettes, comme dans un aller-retour entre production en ciment et Lo-Fi (”Don’t
Cry” ou ”Revival”). Et y rajoute une dose de psychotropes sur ”Sailing”, qu’on
pourrait facilement interdire d’écoute. Juste pour rire. Dans le même style,
”Basement Scene” est lui aussi honorable. ”Memory Boy” nous relève, nous surprend
plutôt, encore une fois, avec sa pop non identifiable, deux minutes de hardiesses avant
ce fameux ”Desire Lines”, tout autant que le saxophone du très Roxy Music ”Coronado”.
Le 11-titres se conclu avec “He Would Have Laughed”, hommage poignant
au regretté Jay Reatard, à foutre les jetons ou à en pleurer dans sa bière,
suivant le degré d’affinité porté à ce prodige parti trop vite. Le corps,
chancelant, et l’esprit, déchirant : Bradford Cox garde le cap dans un
album mixé avec Ben Allen (MERRIWEATHER POST PAVILLION d’Animal Collective à
son palmarès), perdant en shoegaze ce qu’il gagne de classe, en détachement. La relève est assurée.

LIRE EGALEMENT

Deerhunter

MICROCASTLE / WEIRD ERA CONT. (2008)

Chronique écrite par Julien Gremaud

Lire ici

About Author

Check Also

Saxon – Hell, Fire And Damnation

Si le samedi 29 juin 2024, Saxon se produira en tête d’affiche de la Mainstage 2 du Hellfest, alors il …

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *