Folk Music, le terme nous évoque immédiatement une foule d?images d?Épinal qui ont traversé le XXème siècle. De la machine qui tue les fascistes de Woodie Guthrie aux poèmes sonores de Dylan. Se saisir d?une guitare était un acte chargé de sens, une révolution non-violente héritée des baladins et ménestrels du Moyen-Âge.

Modern Folk

Folk Music, le terme nous évoque immédiatement une foule d’images d’Épinal qui ont traversé le XXème siècle. De la machine qui tue les fascistes de Woodie Guthrie aux poèmes sonores de Dylan. Se saisir d’une guitare était un acte chargé de sens, une révolution non-violente héritée des baladins et ménestrels du Moyen-Âge. Les gouvernements pouvaient multiplier les attaques à nos libertés personnelles, la musique restait le bastion des voix indépendantes. Le «peuple» pouvait parler, raconter son quotidien, ses espoirs, s’opposer à la guerre au Vietnam. Nick Drake, lui, ciselait sa douceur introspective à la lueur d’une lune rosée, éphémère et personnelle.

A l’aube du XXIème siècle, alors que Renaud se fait dessouder par ses amis d’hier, que nous reste-il? Après les révoltes Rock, les cris de rage nihilistes du punk et le mal-être grunge, les courants musicaux sont-ils condamnés à être resucés à l’infini ? A l’heure du retour à ordre sécuritaire et d’un désenchantement générationnel, alors même que Radiohead se la joue messianique entouré d’écran Sony, la compilation Modern Folk  nous offre des éléments de réponse. Les chanteurs folks d’aujourd’hui ne se complaisent pas dans une veine passéiste et puriste, ils n’hésitent pas à tirer parti des nouvelles technologies. Owen Pallett (musicien live de Arcade Fire), par exemple, ficelle ses chansons à coup de boucles samplées, de boîte à rythme et d’accords de violons. Avec son groupe Final Fantasy, il nous entraîne dans un monde de romances et de fantômes. Jonathan Wolf (Why ?), lui,  compose un folk qui a gardé une saveur de la rue. Les rangées d’immeubles remplacent la pastorale et les codes du hip-hop viennent se mélanger aux mélodies à la guitare. C’est peut-être là, la force de cette compilation. De mettre en avant des individualités approchant le folk d’une manière très personnelle, même si choisir Devendra Banhart et ses clochards célestes en morceau relève du consensus hype. Tout le contraire d’un Sufjan Stevens qui, même si les Inrockuptibles l’ont encensé, soutient ses projets mégalos d’un sens de l’arrangement riche et vaporeux. Sa musique, véritable symphonie pop-folk, est accompagnée d’une voix introspective et douce qui nous emmène dans dans une Amérique entre fantasme et documentaire. Puis vient Anton Newcombe, compositeur génial et fou furieux voué à l’oubli si ce n’est pour un groupe d’admirateurs transis, jusqu’à la parution de Dig!, documentaire partial qui l’a fait connaître au plus grand nombre. Artisan multi-instrumentiste, totalement opaque à la notion de succès commercial, il multiplie les frasques, mais impose un folk-rock des plus brillants. L’ovni sibyllin Anthony & The Johnsons n’est pas en reste non plus. Hésitant sur son identité sexuelle, il use d’un trémolo digne de faire pleurer les alignements de Carnac. Le vieux briscard de Lou Reed ne s’est pas trompé en l’invitant à chanter  "Perfect Day". La voix envoûtante de Chan Marshall (Cat Power) est également présente, accompagnée ici des Dirty Three, potes de Nick Cave. Oscillant entre mélancolie chaude et sensualité rauque, elle vient de sortir son album (The Greatest) de la maturité.

La plupart des artistes présents sur cette compilation mériteraient une chronique à eux seuls. Emiliana Torrini qui n’aurait aucune peine à faire cesser un cœur de battre, et Ray LaMontagne qui eut une illumination folk en écoutant une chanson de Stephen Still… Autant de chemins qui creusent des sillons qu’aucun vinyl ne renierait, un pied de nez à la mondialisation consumériste et un oui ferme aux individualités. Mon seul regret : les Mountain Goats manquent à l’appel….

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