Par un bel après-midi ensoleillé, alors qu?une horde de festivaliers déferle dans la vallée, c?est au calme, sur une terrasse en pierre, que Matthew Caws, chanteur et guitariste de Nada Surf, se confie : tournées, influences musicales, politique. On pourrait rester des heures à refaire le monde avec notre nouvel ami!

Nada Surf

Tout d’abord, merci de venir nous rendre visite aussi souvent. C’est votre cinquième concert en Suisse cette année! Quels liens entretenez-vous avec ce pays pour y venir aussi régulièrement?

D’un côté la demande du public, de l’autre côté, on a un tourneur en Suisse qui est très cool avec nous et qui nous a toujours épaulés, même dans les moments où il n’y avait pas beaucoup de demandes, en nous invitant en Suisse. Nous lui restons loyaux. De plus, les festivals ici sont très bien gérés, c’est un pays incroyablement beau et les gens sont cools, alors il n’y pas de raison de ne pas venir.

Cela fait de longs mois maintenant que vous tournez en Europe?

Effectivement, on a beaucoup tourné en Europe avec depuis la sortie de The Weight is The Gift en novembre 2005. En tout, nous sommes venus quatre fois en Europe et chaque voyage a duré à peu près un mois.

Entre les concerts, les voyages et les interviews il ne doit pas te rester beaucoup de temps libre. Comment en profites-tu?

Aujourd’hui je suis allé me balader et j’ai fait un bain de soleil. Demain, on part pour Avenches et après le sound check on ira faire du ski nautique sur le lac. On essaie de garder des petits moments de détente quand on peut.

Comment faites-vous pour ne pas tomber dans la routine? Y a-t-il des innovations entre chaque concert ou chaque tournée?

Je ne suis pas sûr qu’il y ait des nouveautés. J’espère que le live aide un peu à créer une nouvelle ambiance. On s’inspire de l’atmosphère du lieu où l’on joue, de l’interaction avec le public. Ou tout simplement du fait qu’il s’agisse d’une nouvelle journée. Il y a  toujours quelque chose de similaire quand même et nous en avons parfois honte. Mais peut-être que si nous habitions dans la même ville et qu’on parvenait à répéter un peu plus souvent, on élargirait un peu notre répertoire qui n’est pas beaucoup plus grand que ce qu’on joue en concert.

Mais le groupe existe depuis onze ans et vous avez quand même quatre albums à votre actif !

Oui c’est vrai. Il m’arrive de jouer de la guitare très simplement mais j’invente aussi pas mal d’accords et parfois j’ai du mal à m’en rappeler alors j’écoute le disque et j’essaie de les retrouver, parfois j’y arrive, parfois pas.

Comment travaillez-vous sur vos albums étant donné que vous habitez assez loin les uns des autres?

J’écris les chansons de mon côté. Puis on se retrouve quatre semaines dans la même ville pour répéter et pour découvrir comment ces chansons peuvent se jouer en groupe. Ensuite on entre en studio. Ça ne fait pas énormément de différence d’habiter dans la même ville ou pas..

Si on vous demandait pour les quinze ans du groupe de sortir un album d’un tout autre genre, lequel serait-ce ?

Je ne sais pas. On joue toutes sortes de musique à notre manière. On est assez libre. On nous définit comme un groupe pop-rock car c’est la définition la plus facile mais en réalité on a autant de chansons très douces que de chansons très dures, il y a des mélodies tristes et des mélodies plutôt ensoleillées. On ne joue pas exprès la musique que l’on joue. C’est pourquoi je pense qu’on ne pourrait pas planifier de faire un album d’un genre musical précis.

Quel est ton coup de cœur musical du moment ?

Je sors d’une période de deux ans durant laquelle j’ai écouté beaucoup de rap. Ça se ralentit un petit peu et maintenant il n’y a qu’un rappeur que j’écoute c’est NAS. Sinon j’écoute un groupe américain qui s’appelle Tapes’n’Tapes, il n’est pas très connu mais ça ne va pas tarder. Surtout il y a un nouvel album de Bob Dylan qui va sortir dans quelques jours, je suis très excité. Et voilà, c’est tout.

Avez-vous, au sein du groupe, des goûts musicaux différents ?

Oui, on aime des styles différents : Daniel écoute plus de reggae que moi, Ira c’est plus de la pop sucrée genre sixties et moi c’est la musique classique et aussi des chose plus underground. Mais au centre du diagramme, ce qu’on retrouve, c’est un panthéon d’artistes qu’on aime tous les trois. Il est bon d’être différent et d’avoir des goûts en commun à la fois. Si on était trop différent, ça ne collerait pas.

Dans l’histoire de la musique, à quelle autre période aurais-tu voulu appartenir ?

Et bien les années soixante. J’adore Dylan. Pour moi comme pour beaucoup de gens, il est le top du top. Si j’avais pu vivre dans les années 65-67, dans sa période dorée, cela aurait été drôlement bien ! Et aussi j’aurai pu aller au C.B.G.B’s dans les années septante, voir les Talking Heads, The Ramones, j’aurai bien aimé aller dans cette boîte tous les week-ends, ah oui j’aurai vraiment adoré !

Quels sont vos projets à la fin de cette tournée en Europe? Retourner en studio?

On va faire un petit break pendant lequel j’espère écrire un peu. En automne, nous allons tourner aux USA avec un groupe plus connu que nous qui s’appelle Guster. On va faire trois semaines de grandes salles avec eux. J’espère qu’on fera un disque cet hiver.

Un projet solo peut-être ?

Non ça serait bête je crois. Je compose déjà ce que j’ai envie avec Nada Surf. Je ne ressens pas le besoin de faire quelque chose de mon côté. Mais qui sait? Il ne faut jamais dire jamais!

Sur le site internet du groupe, tu as publié des lettres que ton père a adressées à Georges Bush. Cela fait-il de Nada Surf un groupe qui fait de la musique militante ?

Nous sommes engagés politiquement en tant que personnes mais nous n’écrivons pas de la musique politique. Le milieu de la musique indépendante est formé de gens qui ont les mêmes convictions que nous. Cela serait comme prêcher un converti.  Si on était un groupe avec une plus grande portée d’écoute, si on passait sur des grandes radios je le ferai peut-être.

Donc ça pourrait arriver ?

Je ne sais pas. S’il y a bien une chose  qui me rend humble c’est le dernier disque de Neil Young, Living with War. C’est un album vraiment lourd, vraiment incroyable. Plutôt que d’écrire des chansons engagées, je préférerai reprendre une de celles qu’il a écrites. Elles disent tout. En ce moment, nous sommes un peu en état de choc car on vient de regarder un film pas très connu et assez difficile à trouver qui s’appelle 9-11 Coverup et qui pose une théorie, que je commence à croire, comme quoi les évènements du 11 septembre 2001 ont été planifiés par la CIA. J’avais déjà entendu parler de la théorie de la conspiration il y a un moment, mais là on est un peu déstabilisé car on commence vraiment à y croire. Et si cela s’avère vrai, je me demande quel sera le prochain chapitre de l’histoire. Y aura-t-il une majorité de personnes qui va y croire? Et si une majorité y croit, que va-t-il se passer? Une révolution?

Malgré le fait que vous fassiez partie d’une minorité dissidente, vous êtes quand même bien accueillis aux USA. Ce n’est pas le cas de certains acteurs de cinéma qui peinent à tourner des films.  Est-il plus facile d’exprimer son opinion politique quand on est musicien que quand on est acteur?

Oui parce que le milieu de la musique indépendante est formé par des gens de gauche et attire un public intellectuel et avisé. À Hollywood c’est très différent, les fans des acteurs hollywoodiens font partie de la classe moyenne, sous-informée et réactive dans une manière plus fermée. Et l’industrie hollywoodienne est très conservatrice.

Photos par ©Grégoire Mastrangelo et ©Alain Groux

Une sélection Lords of Rock:

About Author

Check Also

No Return – Interview d’Alain Clément en direct du Hellfest

(Interview réalisé par Emmanuel le 25 juin 2022 au Hellfest) En cet après-midi pluvieux du …

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *